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À vrai dire, la problématique du concept des “Lumières » se présente aussitôt ici, une fois de plus. Car plus les Lumières ont progressé dans l'histoire, plus elles ont succombé à un rétrécissement du concept de raison: est rationnel ce qui est reproductible.
Cela signifie que la raison devient positiviste. Elle se limite donc à ce qui peut, à tout moment, être présenté sous la forme d'une expérience; mais la conséquence, c'est qu'elle renonce à la question initiale qui lui est propre, à la question: «Qu'est‑ce que c'est? », et elle la remplace par la question pragmatique: « Comment est‑ce que cela fonctionne?
Autrement dit: sous la contrainte de ces mesures de précaution, la raison renonce à la question de la vérité et elle examine seulement celle de la «faisabilité». Elle a ainsi abdiqué fondamentalement en tant que raison5.
----------- l'Université était née parce que la foi déclarait que la recherche de la vérité était possible, et parce qu'elle obligeait à cette recherche qui, de son côté, exigeait ensuite une extension de son domaine dans toutes les directions de la connaissance humaine et donnait ainsi naissance aux différentes Facultés.
Mais, dans la diversité de leurs objets, ces Facultés étaient toutes maintenues ensemble par leur ordonnancement commun à la question de la vérité, dont elles savaient que la possibilité ultime était sauvegardée dans la Faculté de théologie.
Parce que le savoir humain reposait sur une unité ultime, les savants et ceux qui cherchaient à savoir pouvaient s'unir dans l'Universitas des enseignés et des enseignants. L'université est un produit du mandat donné à la raison inclus dans l'acte de foi chrétien; là où cet ensemble se dissout complètement, il se produit obligatoirement une crise fondamentale de l'Université.
Le premier stade d'une telle dissolution, c'est d'abord que la question de la vérité disparaît de l'Université en tant que question non scientifique.
L'Université tombe sous la loi du
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positivisme et devient alors un ensemble d'écoles spécialisées dans lesquelles les différentes spécialisations de la raison positiviste et de la pensée fonctionnelle sont développées à l'extrême.
Ce fut la situation de l'Université allemande depuis la fin de la guerre jusqu'en 1968. Dans cette situation, le seul point commun des différentes entreprises spécialisées est la limitation positiviste de la raison, l'interdiction de la question de la vérité.
Vis à vis d'une telle position de l'Université, le concept d' “imbécialiste” (Fachidiot) n'est pas entièrement déplacé, parce que le principe fondamental positiviste oblige à la spécialisation positiviste et exclut, comme étrangère à la méthode, la question plus profonde de l'origine et de la destination du tout.
Dès lors, non seulement l'explosion de 1968 n'était pas sans fondement, mais encore elle résultait inévitablement de la situation. L'idéologie marxiste, à partir des variantes de laquelle la critique fut menée, est la seule qui reste en fin de compte, contrairement à l'apparence, immanente au système6.
Car, en tant que matérialiste, elle rejette nécessairement le primat du Logos: au commencement il n'y a pas le Logos, mais l'irrationnel: la raison elle-même, en tant qu'elle est un des produits du développement de l'irrationnel, est en dernier ressort quelque chose d'irrationnel.
Autrement dit: les choses, en tant qu'irrationnelles, n'ont aucune vérité, mais seul l'homme peut faire la vérité; celle‑ci est une prise de position de l'homme, et cela veut dire en réalité: il n'y a pas de vérité.
Il n'y a que des prises de position de l'homme, c'est‑à‑dire que la partialité nécessaire de la raison, qui connaît d'avance la contrainte de l'évolution des choses, précède cette évolution et l'élève au rang de liberté.
A partir de ces prémisses, le positivisme peut être dépassé par des attributions de sens qui se laissent présenter comme morales, parce qu'elles vont au devant de la loi de l'évolution: c'est là‑dessus que reposent la fascination de ces positions et également l'infériorité obligatoire de toutes les argumentations bourgeoises qui persistent dans le positivisme.
Mais le facteur qui, dans une telle construction, réunit les spécialisations et les élève de nouveau à l'Universitas, est la pression du Parti, et dès lors
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l'Université n'est pas rétablie comme un espace de liberté pour les « Lumières «, mais elle est au contraire définitivement niée.
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--------- ce n'est pas un hasard si la révolte de 1968 en Allemagne est venue, dans une grande mesure, des Facultés de Théologie, parce que c'est dans ces Facultés que la crise de la spécialisation positiviste était ressentie le plus vivement et que la confessionalité, dépouillée de sa revendication de vérité, pouvait se transposer sans peine dans la prise de parti, finalement toujours raisonnable, pour l'amélioration du monde.
