Arius 9

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22. Dès l'année suivante, la plupart des prélats qui venaient d'assister au concile de Cologne, se réunissaient à Sardique, où trois cents évêques, répondant à l'appel de saint Jules I, vinrent proclamer une seconde fois la doctrine de Nicée. Les empereurs Constant et Constance ne purent, malgré les intrigues des Ariens, refuser leur consentement à cette solennelle assemblée. Osius de Cordoue fut encore chargé de la présider, en qualité de légat du pape. Nous croyons devoir reproduire très-exactement la liste des évêques gaulois qui siégèrent au concile de Sardique. C'est un des plus antiques monuments de nos archives chrétiennes et nationales. La voici dans l'ordre des souscriptions : Maximus de Trêves Verissimus de Lyon; Victor de Metz; Valentin d'Arles; Desiderius de Langres; Eulogius d'Amiens ; Servatius de Tongres; Dyscolius de Reims; Supérior de Tournai; Mercurius de Soissons; Diopelus d'Orléans; Eusèbe de Rouen; Severinus de Sens; Satyrus, siège inconnu ; Martin de Mayence ; Paul d'Augusta Tricastinorum (Saint-Paul-Trois-Châteaux); Optatien de Troyes; Nicasius (Nicaise) de Die, alias Digne, le même qui avait déjà paru au concile œcuménique de Nicée; Victor de Worms; Sempronius, siège inconnu; Simplicius d'Autun; Metianus d'Avignon; Amandus de Strasbourg; AEmilianus de Valence; Justinien de Bâle ; Victo-

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1. La Germanie se partageait alors en deux grandes divisions : La Germanie lre ou Supérieure, comprenant les provinces actuelles de l'Alsace, du Bas-Rhin et de la Bavière Rhénane. La Germanie IIe ou Inférieure avait pour capitale Cologne et comprenait les Ubii, Gugerai, Toxandri, Tungri ou Aduaticiet Menapii.

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rinus de  Paris;  Saturnilus, siège inconnu; Abundantias, item; Donatien de Châlon et Maximus de la cité des Veromandui (Noyon). L'épiscopat  catholique  s'était donné  rendez-vous des provinces d'Espagne, des Gaules, d'Egypte, de la Palestine et de l'Italie méridionale. Du reste, on n'y voyait aucun représentant des églises d'Arménie, de Perse, de la Mésopotamie, régions où l'Arianisme n'avait point encore pénétré. Cette circonstance explique pourquoi le concile de Sardique ne fut point revêtu du caractère d'œcuménicité qui distingue celui de Nicée. D'ailleurs les pères n'eurent point à y formuler d'articles de foi ; ils se bornèrent à reconnaître le symbole du concile de Nicée, dont la grande assemblée de Sardique peut être considérée comme la suite et le corollaire. Les prélats ariens vinrent en moins grand nombre, mais ils se firent accompagner par le comte Musonien, et par Hesychius général des armées impériales, espérant que le poids des armes pourrait faire pencher la décision en leur faveur. Osius de Cordoue, légat du pape saint Jules, déjoua par sa fermeté ces coupables intrigues. Le concile procéda à ses délibérations, sans vouloir y admettre ni comte ni général, résolu de porter une sentence indépendante des influences de la polilique et du manège des cours. Saint Athanase se présenta, muni de toutes les pièces qui prouvaient son innocence et la fausseté des accusations de ses ennemis. Les évêques bannis de leur siège par Grégoire, patriarche intrus d'Alexandrie, paraissaient avec les chaînes dont on les avait chargés ; des témoins oculaires vinrent déposer au sujet des violences qu'ils avaient vu commettre. Des églises entières avaient envoyé des députés qui redemandaient au concile de Sardique leurs pasteurs légitimes, bannis, outragés, persécutés par les Ariens; ils racontaient les affreux traitements subis par les vierges consacrés au Seigneur, par de vénérables et saints pontifes, par des religieux, des anachorètes. L'original du fameux procès-verbal de l'enquête faite au sujet de l'affaire d'Ischyras, dans la province de Maréotide,  fut  déposé par saint Athanase entre les mains des pères ; l'innocence du saint patriarche y était confirmée par le témoignage de ses ennemis eux-mêmes. Les évêques d'Orient ne pouvaient approuver des délibérations où l'on tenait si peu de

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compte de la force matérielle dont ils disposaient. Ils se retirèrent brusquement du concile et rejetèrent toutes les mesures de conciliation proposées par les catholiques. Osius de Cordoue alla même jusqu'à leur faire cette promesse : « Si la suite des procédures établit la culpabilité d'Athanase, vous pouvez vous tenir assurés de la rigueur de sa condamnation. Dans le cas où il réussirait à prouver son innocence, si vous persistez à ne le pas recevoir à votre communion, je le déterminerai à se démettre volontairement de son siège et l'emmènerai avec moi en Espagne.» Saint Athanase lui-même souscrivit à ces conditions; mais ses ennemis se défiaient tellement de la justice de leur cause, qu'ils refusèrent de rien entendre. Ils repartirent immédiatement pour leurs églises, sous le prétexte frivole que l'empereur leur écrivait d'y rendre des actions de grâces à Dieu, à l'occasion de sa récente victoire sur les Perses. La retraite des Ariens n'entrava en rien la marche du concile. Trois objets étaient soumis à son examen : 1° Une déclaration de foi catholique sur la question soulevée par l'Arianisme ; 2° La cause des évêques chassés de leur siège et accusés par les Ariens ; 3° Les plaintes formées contre les Ariens eux-mêmes par leurs victimes. Sur le premier point, il fut décidé à une immense majorité, qu'on se tiendrait au symbole de Nicée, comme définissant, d'une manière explicite et précise, la foi catholique sur la divinité du Fils de Dieu. On passa donc immédiatement à l'appel des causes de saint Athanase, Marcel d'Ancyre et Asclépas de Gaza, chassés de leurs sièges par les Ariens. Toutes les accusations déjà soumises au concile de Tyr contre le patriarche d'Alexandrie furent reprises, examinées de nouveau et rejetées unanimement comme d'infâmes calomnies. Marcel d'Ancyre et Asclépas de Gaza furent aussi reconnus innocents. En conséquence, les trois prélats furent solennellement admis à la communion de l'Eglise, leur autorité légitime sur les sièges dont ils avaient été dépouillés fut confirmée, et les usurpateurs frappés d'anathème. Restait à apprécier la conduite des évêques d'Orient qui n'avaient cessé, malgré la décision du concile œcuménique de Nicée, de communiquer avec les Ariens, de les soutenir de leur crédit à la cours de Constantinople, et de les imposer par la violence  sur les

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sièges des principales églises. Les chefs de cette faction jusque-là impunie, furent nommément déposés de l'épiscopat et excommuniés. Ils étaient au nombre de huit, savoir : Théodore d'Héraclée, Narcisse de Néroniade, Etienne d'Antioche, Georges de Laodicée, Acace de Césarée en Palestine, Ménophante d'Éphèse, Ursace de Singidunum et Valens de Mursia. Ces deux derniers avaient déjà été frappés d'anathème par le concile de Nicée. Les Pères s'occupèrent ensuite de la rédaction de canons de discipline, où ils reconnaissent et expliquent catégoriquement le droit d'appel au pape, la juridiction du siège de Rome sur les causes ecclésiastiques, l'obligation de se soumettre à son jugement ou à celui des légats commis par le souverain pontife à l'examen des faits sur les lieux mêmes. Ce sont ces délégués pontificaux qu'on a nommés depuis légats a latere. D'autres canons défendent les translations arbitraires d'un évêché à un autre, les nominations d'évêques à des sièges dont les titulaires ont appelé au pape, avant le jugement définitif du souverain pontife. Les actes du concile furent ensuite envoyés au pape saint Jules, et aux deux empereurs Constance et Constant, à Trêves et à Antioche.

 

23. Voici la lettre synodale qui fut, à cette occasion, adressée à toutes les églises du monde. « Les attentats des Ariens contre les fidèles serviteurs de Jésus-Christ ont été nombreux. Ce fut la lutte de l'erreur contre la vérité. Mais enfin Dieu permit que l'attention des très-cléments empereurs fût éveillée sur tant d'impiétés et de sacrilèges. Avec l'assentiment de ces glorieux princes, une assemblée d'évêques s'est réunie à Sardique, pour mettra un terme à tant de discordes, anathématiser les doctrines des nouveaux sectaires et rétablir dans son intégrité le dogme catholique. Il s'agissait surtout d'examiner la cause, aujourd'hui célèbre dans tout l'univers, de nos illustres frères Athanase, évêque d'Alexandrie, et Marcel d'Ancyre. Nous ne croyons pas qu'il existe un seul homme aux oreilles duquel ne soit parvenu le récit des persécutions et des souffrances endurées par ces deux héroïques proscrits. La perversité de la secte arienne sembla triompher un instant. Mais le grand Dieu qui a voulu souffrir pour nous jusqu'à la mort

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ne devait pas laisser tant de crimes impunis. Il vous souvient de la lettre collective adressée par Eusèbe de Nicomédie, Maris, Théodore, Diognète, Ursace et Valens à l'évêque de Rome, Jules, notre frère. Cette missive remplie d'accusations contre Athanase et Marcel n'était qu'un tissu de mensonges. Notre très-cher frère Jules convoqua à cette époque un concile qui devait, à Rome même, examiner l'affaire. Les Ariens ne s'y présentèrent pas. Leur abstention était déjà une preuve évidente de leur mauvaise foi. Mais ils devaient ici même nous en donner une autre plus convaincante encore. Ils vinrent à Sardique; mais en apprenant qu'Athanase, Marcel d'Ancyre et Asclepas de Gaza, leurs victimes, se tenaient prêts à subir avec eux une confrontation publique, ils refusèrent de se rendre au sein de notre assemblée. A plusieurs reprises, par des notifications individuelles, et des significations publiques, nous les avons convoqués. Ils ne daignèrent pas en tenir compte. Cet auguste synode, où tant d'évêques étaient rassemblés pour les entendre, n'obtint pas d'eux cette marque de déférence. Notre vénérable président, Osius de Cordoue, cet auguste vieillard, confesseur de la foi, dont la vie s'est tout entière épuisée au service du Seigneur, parmi tant de labeurs, de tribulations et de fatigues, prit la peine de les inviter lui-même. L'Église catholique, dans la personne de ses évêques, vous attend, leur disait-il. Tous les griefs que vous avez cru devoir articuler contre nos frères dans le sacerdoce seront discutés en présence des accusés eux-mêmes. Justice complète et impartiale sera rendue. —C'est ainsi qu'il leur parlait. Cependant nous les attendîmes en vain. Loin de se rendre à ces pressantes sollicitations, ils prirent la fuite. Par cette résolution soudaine, ils ont suffisamment découvert l'inanité de leurs accusations. Pour eux d'ailleurs il s'agissait moins d'éviter la confrontation avec leurs victimes innocentes, que l'examen juridique des crimes dont ils sont chargés eux-mêmes, et dont les preuves nous sont arrivées de toutes parts. Les captifs venaient à nous avec les fers dont les Ariens les avaient chargés; les proscrits, les exilés, les condamnés aux mines, se présentaient avec leurs parents, leurs voisins, leurs compatriotes attestant les violences dont

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ils avaient été l'objet de la part des sectaires. Dans le nombre, se trouvèrent des évêques qui nous montraient les chaînes dont on avait chargé leurs bras. Heureux du moins ceux qui ont survécu à cette persécution sanglante ! Tous n'eurent pas cette fortune. Ainsi, nous avons constaté que l'évêque Théodore a succombé sou le poignard de ces impies. Ces vénérables confesseurs nous faisaient toucher les cicatrices de leurs plaies. Les uns portaient la trace des épées parricides qui les avaient transpercés; d'autres nous racontaient les tortures qu'ils avaient endurées dans les cachots où l'on prétendait les faire mourir de faim. Les faits étaient attestés non par un ou deux témoins isolés, mais par des églises entières dont la population en masse était venue protester contre tant d'horreurs. Tous s'accordaient dans la description des scènes de violence dont ils avaient eu le cruel spectacle : on nous représenta l'original des lettres que Théognis avait écrites à l'empereur pour requérir la force armée contre Athanase et Marcel. Les diacres qui avaient écrit ces lettres infâmes, sous la dictée de Théognis, en reconnaissaient eux-mêmes l'authenticité. Ils nous détaillaient chacune des scènes d'horreur commises ensuite ; les violences de la soldatesque; l'appareil des tourments déployé par les juges contre les catholiques fidèles; les outrages exercés contre les vierges du Seigneur, l'incendie des églises ; l'emprisonnement des ministres de Jésus-Christ, toutes les fureurs enfin du fanatisme des partisans d'Arius, Ariomanitarum. Tel fut le véritable motif du départ des évêques ariens. D'ailleurs toutes leurs calomnies contre le saint évêque Athanase ont été percées à jour. Ils l'avaient accusé d'avoir tué son collègue Arsène. Or, Arsène est encore aujourd'hui vivant. Ils l'avaient accusé d'avoir profané les saints mystères en brisant les vases sacrés d'un prétendu prêtre Ischyras, au moment où celui-ci célébrait le sacrifice eucharistique. Or, Ischyras n'était pas prêtre, il n'avait pas de vases sacrés, et n'avait jamais offert le sacrifice. Ils accusaient Marcel d'Ancyre d'avoir enseigné que le Verbe, fils de Dieu, n'existait point avant son incarnation dans le sein de la bienheureuse Vierge Marie. Or, mille témoins euriculaires sont venus nous attester que Marcel d'Ancyre réfutait au

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contraire cette proposition arienne dans tous ses discours et proclamait l'éternité et la consubstantialité du Fils de Dieu. Asclepas de Gaza, dont l'acte d'accusation avait été rédigé par Eusèbe de Césarée lui-même, s'est également justifié de toutes ces calomnies dont aucune n'avait un fondement sérieux. Après avoir examiné juridiquement la cause de ces trois illustres confesseurs dont la vertu et l'innocence ont été solennellement reconnues, il nous a fallu procéder à une enquête sur la conduite de leurs accusateurs. Nous n'avons pu constater de leur part que des crimes nouveaux. Ils ne se sont point contentés d'admettre à leur communion les Ariens anathématisés par le concile de Nicée; mais ils les ont de plus promus aux dignités et aux honneurs de l'Église. Les simples diacres furent ordonnés prêtres; les prêtres furent élevés à l'épiscopat, uniquement parce qu'ils professaient notoirement l'hérésie et que dès lors ils pouvaient mieux en propager le venin parmi les populations. Les malheureux qui se sont ainsi rendus coupables de ces sacrilèges, en dehors d'Eusèbe de Nicomédie que la mort a frappé, sont : Théodore d'Héraclée; Narcisse de Néroniade, en Cilicie; Etienne d'Antioche; Georges de Laodicée; Acace de Césarée, en Palestine; Ménophante d'Éphèse; Ursace de Singidon en Mésie et Valens de Mursia en Pannonie. Quand ils furent venus à Sardique, refusant de prendre part aux délibérations du saint concile, ils affectèrent de se tenir tous ensemble logés dans la même demeure. Chaque jour ils se réunissaient pour imaginer des propositions d'ajournement et des moyens dilatoires qu'ils s'efforçaient de faire adopter par les évêques étrangers. Leur but était d'arriver à la dissolution du concile. Cela nous a été attesté par deux prêtres, Arius de Palestine et Etienne d'Arabie, qui les accompagnaient alors et qui les ont quittés depuis, indignés de leurs manœuvres perfides. Cependant quand les sectaires purent constater l'inutitité de leurs tentatives et surtout quand ils apprirent que le concile ouvrait juridiquement une enquête sur les crimes dont ils s'étaient rendus coupables, ils quittèrent sur-le-champ la ville de Sardique et disparurent. Nous les avons solennellement anathématisés, et le saint concile a déclaré que, s'ils revenaient à résipis-

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cence, ils ne pourraient jamais être admis qu'à la communion laïque. Les intrus Grégoire d'Alexandrie, Basile d'Ancyre et Quintianus de Gaza ont été frappés de la même sentence. Quant à nos frères et collègues dans l'épiscopat, Athanase d'Alexandrie, Marcel D'Ancyre et Asclepas de Gaza, ainsi que tous leurs prêtres et diacres fidèles, nous déclarons devant Dieu et proclamons à la face de l'univers qu'ils sont innocents de toutes les accusations portées contre eux; que leur doctrine est conforme à la vérité; que leur vie est celle de dignes ministres de Jésus-Christ. En conséquence nous avons écrit au clergé et aux fidèles de leurs églises d'avoir à les reconnaître pour leurs légitimes pasteurs et de chasser les mercenaires, loups dévorants, que la perfidie arienne avait voulu introduire dans le bercail. Telle est notre sentence, frères bien-aimés. Désormais donc sachez sur qui doivent tomber vos anathèmes. Rappelez-vous qu'il ne saurait y avoir rien de commun entre la lumière et les ténèbres. Séparez-vous des enfants de perdition. Nulle alliance entre le Christ et Bélial. Nous vous supplions, bien-aimés frères et collègues, de porter la décision de notre saint synode à la connaissance des fidèles, et de vouloir bien nous envoyer par écrit votre adhésion à nos décrets. Ainsi le monde entier saura que l'épiscopat catholique n'a qu'un cœur et qu'une âme sous la direction de l'Esprit-Saint 1. »

 

   24. La décision du concile de Sardique fut accueillie par les applaudissements du monde chrétien. Vainement les Ariens essayèrent une calomnie odieuse contre les deux évêques chargés de remettre à l'empereur Constance la lettre synodale du concile. A leur arrivée à Antioche, l'évêque de cette ville, Etienne, avait gagné, à prix d'argent, un domestique des deux légats, qui introduisit la nuit, dans leur appartement, une femme de mauvaise vie. Cette malheureuse, troublée à la vue des deux vénérables prélats s'était enfuie, divulguant par toute la ville l'odieuse trahison dont on avait voulu la rendre complice. Cet incident servit à dessiller les yeux du trop faible Constance. Après une informa-

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1. Labbe, V'IleH, Cnnci!.. iorr.. II. col. C79-6S*.

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tion juridique où l'arien Etienne fut convaincu d'avoir ourdi cette infâme machination, l'empereur le remit au jugement des évêques présents alors à Antioche, qui le déposèrent de l'épiscopat et l'excommunièrent. Constance admit alors les envoyés du concile en sa présence, reçut favorablement leur message, et ordonna le rappel des prélats exilés. Il manifesta même le désir de voir saint Athanase et lui écrivit trois lettres, de sa propre main, pour le prier de se rendre à la cour. Dans son apologie contre les Ariens, l'illustre patriarche nous a transmis le texte de ces trois épîtres impériales. En même temps qu'elles sont un monument curieux de la chancellerie byzantine au IVe siècle, elles nous révèlent les prétentions absurdes et la duplicité vraiment ingénue de Constance. Il s'intitule, comme son père, le Victorieux, et de plus il s'attribue l'initiative du rappel d'Atbanase. On ne saurait allier plus de naïveté à un plus insupportable orgueil. Voici ses trois lettres. « Constance, Victorieux, Auguste, à Athanase. Ma clémence impériale n'a point permis que vous fussiez plus longtemps en butte aux orages et aux vents furieux de l'adversité. Alors que proscrit de votre sol natal, vous portiez vos pas errants dans les solitude les plus sauvages, demandant aux hôtes du désert un asile contre la cruauté des hommes, mon infatigable sollicitude vous protégeait de loin. Si j'ai tardé si longtemps à vous manifester ces sentiments, c'était dans l'espérance de vous voir bientôt recourir à mon intervention pour mettre un terme à vos malheurs immérités. J'apprenrds que, par une réserve exagérée, vous avez craint de me paraître importun en faisant une pareille démarche. C'est pourquoi je vous adresse, dans mon impériale munificence, cette invitation à vous rendre près de moi. N'hésitez donc plus à venir en ma présence jouir des bienfaits que je vous ai ménagés et de la joie d'être rendu à votre patrie. J'ai écrit dans ce sens au seigneur Constant, Victorieux et Auguste, mon frère, le priant de vous accorder l’autorisation de partir et de hâter le moment où, comblé de mes faveurs, vous rentrerez dans votre église.» Malgré cette emphase de bienveillance, ou peut-être en raison même de ces mensonges officiels, saint Athanase ne crut pas devoir quitter Aquilée où il

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s'était réfugié après le concile de Sardique. Constance lui écrivit donc un nouveau billet : «Déjà par une lettre précédente je vous signifiais d'avoir à venir sans crainte recevoir ici l'assurence de mon amitié pour vous. J'ai hâte de vous rendre à la cité d'Alexandrie. N'hésitez donc plus. Prenez les relais des postes impériales et venez près de moi. Tous vos vœux et les miens saront comblés. » Athanase n'en fit rien; il savait ce que valaient les promesses de Constance. Il attendit encore. Une troisième lettre ne tarda point à lui parvenir. Elle était ainsi conçue : « J'ai rencontré à Édesse, d'où je vous écris, quelques clercs de votre église. Par leur conseil, je me suis déterminé à vous expédier l'un d'entre eux, pour vous prier de hâter votre retour. Aussitôt que je vous aurai revu, vous partirez pour Alexandrie. Depuis longtemps déjà vous avez dû recevoir mes lettres, et cependant vous n'êtes point venu. Maintenant je vous supplie de ne pas différer davantage et de vous prêter aux désirs du peuple alexandrin qui vous attend. Le diacre Achillas, auquel je remets cette lettre, vous expliquera plus en détail quelles sont mes intentions bienveillantes. » —- Cette fois, dit saint Athanase, je me décidai à partir. D'Aquilée où j'étais alors, je vins à Rome prendre congé du pontife Jules, qui me reçut avec les témoignages de la plus sincère bienveillance. L'Eglise romaine partageait sa joie et me comblait de félicitations et d'hommages. Le pontife voulut me donner une lettre adressée au clergé et aux fidèles d'Alexandrie. Elle était conçue en ces termes 1 :

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