Le Fils de Dieu triomphalement accueilli, n’a pas trouvé un homme pour lui ouvrir sa porte
Quand
Jésus est descendu de Béthanie à Jérusalem, le
dimanche des Rameaux, on lui fit une réception
grandiose et solennelle. Le peuple étendait sous ses pieds des
manteaux et des rameaux, acclamant le
Fils de David. Tous criaient : «
Hosanna ! Béni soit celui qui vient au nom du
Seigneur et le roi d’Israël » (Jn
12, 13). Tous rendaient témoignage de la résurrection de Lazare déjà enseveli
dans le sépulcre. Pour cette raison, la
foule a accueilli le Christ avec une grande pompe. Au bruit de cette entrée
triomphale et de cette réception exceptionnellement
festive, Jérusalem entière fut en émoi. Chacun se
demandait : « Qui est cet homme ? » (Mt
21, 10). Fidèle à son habitude, Jésus
entra dans le Temple et guérit les
boiteux et les aveugles qui s’y trouvaient
(Mt 21, 14). Ces miracles provoquèrent
l’indignation des grands prêtres et des
scribes. Mais Jésus était heureux
d’entendre les cœurs innocents des petits
enfants l’acclamer, car il était écrit
que de leurs bouches devaient sortir les
louanges de Dieu (Mt 21, 16). Les
festivités achevées, comme il était tard,
curieusement, ne voyant personne pour
lui offrir l’hospitalité ni lui donner à
manger, Jésus sortit de la ville et
retourna passer la nuit à Béthanie avec ses
disciples.
Le
Fils de Dieu triomphalement accueilli, n’a pas trouvé un homme pour lui ouvrir sa porte. De même, à notre
époque, combien notre accueil, notre amour et nos louanges sont superficiels, sans
consistance, comme un simple vernis religieux.
Aujourd’hui, nous nous contentons
d’accomplir des rites qui n’ont aucune incidence sur notre vie concrète parce
qu’ils sont vécus sans recueillement, sans intériorité et sans vérité. Les
habitants de Jérusalem n’ont pas compris la profondeur de la visite du Fils de Dieu
; le peuple, livré à ses passions et à ses ambitions politiques, fut démonstratif,
superficiel et bruyant.
En proie à toutes les convulsions
mondaines, ils ne pouvaient comprendre le
mystère de la visite du Roi-Messie, le
Roi qui apporte la paix aux nations,
comme l’avait annoncé le prophète
Zacharie. « Exulte avec force, fille de Sion !
Crie de joie, fille de Jérusalem ! Voici
que ton roi vient à toi : Il est juste et
victorieux, humble, monté sur un âne,
sur un ânon, le petit d’une ânesse. Il
retranchera d’Éphraïm la charrerie et de
Jérusalem les chevaux ; l’arc de guerre sera retranché. Il annoncera la paix aux
nations. Son empire ira de la mer à la mer et du Fleuve aux extrémités de la
terre » (Za 9, 9-10). Les habitants de Jérusalem veulent un chef messianique,
sans chercher à saisir la grandeur silencieuse
du message de Jésus. Le peuple n’accueille pas le Christ dans son
âme ; il se livre à une simple
démonstration de force chamarrée et outrancière.
Le plus difficile est d’aimer Jésus en esprit et en vérité, pour l’accueillir dans son cœur et dans les profondeurs de son être. Le véritable accueil est silencieux. Il n’est pas diplomatique, théâtral ou sentimental. Aujourd’hui, de la même manière, lorsque nous acclamons le Christ lors des grandes fêtes liturgiques, nous devons instamment veiller à ce que notre joie ne soit pas purement factice. Souvent les hommes ne donnent pas au Fils de Dieu la possibilité de demeurer dans leurs cœurs.
Cardinal Robert Sarah