Nestorius 6

Darras tome 13 p. 57

 

34. Nestorius arriva le premier à Éphèse. «Il y parut, dit l'his­torien Socrate, avec une suite nombreuse de laïques de toute con­dition, qui lui faisaient escorte2. » Le comte Irénée, l'un des officiers les plus considérables de la cour, avait voulu l'accompagner par pure amitié et sans aucune mission officielle. L'empereur ne jugea point à propos, comme autrefois Constantin le Grand, d'assister en personne au concile. Saint Isidore de Péluse le lui avait cependant conseillé, dans une lettre aussi ferme que respectueuse. « Si vous preniez le temps de vous rendre aux délibérations d'Éphèse, lui mandait-il, je serais pleinement rassuré. Votre présence ferait taire les ennemis de la foi. En tout cas, votre piété impériale pourrait prévenir bien des désordres si elle daignait enjoindre aux ministres qui la représenteront de ne s'immiscer sous aucun prétexte dans les questions dogmatiques. Autrement les perturbateurs s'ap­puieront de leur autorité, qui sera la vôtre, pour leurs perfides manœuvres, autrement nous auront le triste spectacle de l'empire en lutte avec Dieu. Au reste l'Église de Jésus-Christ est fondée sur la pierre immuable, contre laquelle les portes de l'enfer ne prévaudront jamais 3. » Les prophétiques avertissements du soli­taire n'eurent pas le succès qu'il s'en était promis. Théodose le Jeune, toujours aveuglé par sa prévention, choisit pour son repré­sentant à Ephèse l'un des plus intimes amis de Nestorius, le comes domesticorum Candidien. Il est vrai que, dans la lettre officielle adressée au concile, l'empereur tenait ostensiblement un langage conforme aux vœux de saint Isidore. « En chargeant, disait-il, le préclarissime comte des domestiques de se rendre à votre saint synode, je lui ai prescrit de ne s'immiscer d'aucune sorte dans les questions de dogme, ni dans les controverses tou-

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' S. Cœlestin., CommonUorium episcop. et presbyter. euntibus ad concilivm; tom. cit., col. 503. — 2. Socrat., Hist. ecclcs., Mb. Vil, cap. xxxiv; Patr.grœc, tom. LXV1I, col. 813 — 3. S. Isidor. Pelus., lib. I, Epist. cccxi; Patr. grœc.t tom. LXXVIH, col. 362.

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chant la foi. Cela n'appartient qu'aux évêques; un laïque qui aurait cette audace serait un sacrilège. Mais je l'ai chargé d'écarter d'Éphèse les moines et les séculiers qui s'y rendent en foule, et qui y viendront encore, attirés par la curiosité et l'attrait de ce grand spectacle. Il importe que la majesté de vos délibérations et leur tranquillité même ne soit pas troublée par une multi­tude indiscrète et tumultueuse. Candidien devra veiller en outre à ce que la discussion ne dégénère pas en rivalités de personnes ou de partis. Il lui est expressément défendu de laisser un évêque sortir d'Éphèse sous aucun prétexte, soit pour retourner dans son diocèse, soit pour tout autre voyage, même celui qu'il vou­drait faire à notre cour impériale, avant que la sentence défini­tive ait été rendue1. Aucune autre affaire ecclésiastique ne pourra être traitée avant la question dogmatique qui fait le principal objet de cette réunion. » L'empereur informait ensuite les pères qu'afin de mieux assurer le calme et la paix des esprits, durant leur sé­jour à Éphèse, il avait pris des mesures pour que les tribunaux civils s'abstinssent de juger en matière criminelle, se réservant, si besoin était, d'évoquer à Constantinople même les affaires de cette nature qui se présenteraient dans l'intervalle. « Enfin, disait-il en terminant, je tiens à vous prévenir que le très-magnifique comte Irénée n'a reçu de nous aucune mission. C'est uniquement par amitié pour le très-saint Nestorius, évêque de notre illustre capi­tale, qu'il a voulu l'accompagner à Éphèse1. » Cette dernière phrase, si élogieuse à l'endroit de l'hérésiarque, démentait l'impar­tialité affichée dans le corps de la lettre. Théodose le Jeune venait de dire qu'un laïque ne doit pas s'immiscer dans les controverses de religion, et il préjugeait la sentence ecclésiastique en décernant d'avance un brevet d'éminente sainteté à un évêque accusé d'héré­sie. Nous ne savons si les instructions verbales données à Candidien furent conformes à ce programme écrit. Mais nous verrons bientôt comment il remplit son mandat.

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1 Cette précaution de la chancellerie impériale semble avoir été prise contre saint Cyrille, dont on espérait la condamnation. — 2. Tlteodos., Sacra ad sijnodum missa par Candidian.; Labbe, Concil., tore. III, col. 442.

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35. Saint Cyrille s'était embarqué aussitôt après les fêtes pascales, avec cinquante évêques d'Egypte. Durant une relâche à l'île de Rhodes, le patriarche écrivait à ses fidèles alexandrins : « Par la grâce et la bonté du Christ Notre Sauveur, nous  avons heureusement accompli cette première traversée, et nous pouvons rendre grâces au Dieu qui domine la puissance des mers et calme l'agitation des flots. Absent de corps, je suis toujours au milieu de vous par la pensée. Continuez, bien-aimés fils, à prier le Sei­gneur, afin qu'il daigne achever son œuvre, dompter les résistances ennemies,  apaiser la tempête des passions et  rendre la   paix à l'Église 1. » Le navire aborda au port d'Éphèse quelques jours seulement avant la Pentecôte. Le métropolitain de cette ville, Memnon, accueillit saint Cyrille avec les plus grands honneurs. Les partisans de Nestorius lui en firent un crime. Memnon en effet n'avait point agi de la sorte à l'arrivée de l'hérésiarque. Sans le traiter comme un condamné, puisqu'il ne l'était pas encore, il gardait vis-à-vis de lui une attitude de réserve commandée par la situation même. Sa métropole, ou exarchat d'Éphèse, selon l'expres­sion usitée par les grecs, comptait plus de quarante évêques sou­mis à sa juridiction. Memnon les avait appelés près de lui, et cette nombreuse phalange épiscopale ne dissimulait pas l'horreur que lui causaient les blasphèmes de Nestorius. Cependant le terme du 7 juin, primitivement fixé pour l'ouverture du concile, appro­chait. On savait que Juvénal patriarche de Jérusalem avec les évêques de la Palestine et de la Phénicie, et Jean patriarche d'Antioche avec ceux de la Syrie, étaient en chemin. Pour leur laisser le temps d'arriver, on recula de seize jours l'époque de la première session, qui fut solennellement prorogée au 22 juin. Ce délai était plus que suffisant. En effet Juvénal, le plus éloigné de  ceux qu'on attendait, arriva cinq jours après la Pentecôte. Il n'en fut pas de même de Jean d'Antioche. Des courriers  expédiés par lui annonçaient constamment un nouveau retard, causé tantôt par le mauvais  état des routes, tantôt par  des accidents de

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1. S. Cyrill., Epist. xij Patr. grax., tom. LXXV11, col. 128.

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voyage, tantôt par la maladie ou la fatigue de quelques évêques. En réalité, Jean d'Antioche différait à dessein son arrivée, par un calcul d'ambition et de vanité personnelle. Secrètement favo­rable à Nestorius, il ne voulait point intervenir dans la con­damnation de cet hérésiarque, et il se réservait, au cas où cette condamnation serait prononcée sans lui, de procéder ensuite à l'examen de la double accusation dont saint Cyrille était l'objet pour les anathématismes dénoncés par Théodoret, et pour les prétendus excès de pouvoir dont se plaignaient les imposteurs Chérémon et Sophronas. Du reste, Jean d'Antioche n'avait garde de rien laisser transpirer de ces perfides projets. Les lettres qu'il écrivait de chacune de ses haltes étaient toutes adressées à saint Cyrille : elles renfermaient les expressions les plus chaleureuses de respect et d'hommages pour ce patriarche. Cepen­dant les évêques réunis à Éphèse préludaient aux délibérations sy­nodales par des conférences et des entretiens dogmatiques. Ils étaient unanimes à proclamer leur foi à la maternité divine de Marie, à l'union hypostatique des deux natures et à l'unité de personne en Jésus-Christ. Un grand nombre d'entre eux essayèrent de ramener Nestorius à ce sentiment. Acacius de Melitène, dont la piété et la science étaient universellement admirées, s'y employa avec le zèle d'une amitié véritable. Il était lié avec l'orgueilleux pa­triarche et il voulait le sauver en le tirant de son erreur. Nestorius parut touché de ses exhortations. « Après tout, s'écria-t-il un jour, je ne m'obstinerai pas davantage. Puisqu'on le veut, je dirai que la sainte Vierge est Mère de Dieu (theotoxos), pourvu qu'on m'accorde qu'elle est aussi mère de l'homme (Antropotoxos) » Cette parole donna quelque espérance de le voir se convertir enfin à la foi catholique. Mais, le 19 juin, reprenant avec Acacius et d'autres évêques cette importante controverse, il se montra plus intraitable que jamais. « Si vous persistez, dit-il, à soutenir que le Verbe, Fils de Dieu, est la même personne que le Christ, vous serez obligés également, puisque la Trinité est indivisible, d'admettre que le Père et le Saint-Esprit se sont eux-mêmes incarnés. » Les évêques de son parti allèrent encore plus loin. « On a tort, dit l'un d'eux, de flé-

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trir les juifs du nom de déicides. Ce n'est pas un Dieu mais un nomme qu'ils mirent à mort, en crucifiant Jésus-ChrisL » Acacius de Mélitène ne voulut pas en entendre davantage. Il se retira déses­péré. Le même jour, Théodote d'Ancyre et quelques autres évêques tentèrent une nouvelle démarche près de Nestorius. « Jésus-Christ est Dieu, lui dirent-ils. Les Écritures sont formelles sur ce point. Par conséquent la Vierge est mère de Dieu, puisqu'elle a enfanté Jésus-Christ. — Non, répondit l'hérésiarque. Jamais je n'appellerai Dieu un enfant que l'on vit naître, qui eut un mois, puis deux mois et qui avait besoin pour vivre du lait de sa mère ! Tout est rompu entre nous. Je demeure pur de vos erreurs, et je renonce désormais à votre communion 1. » On atteignit de la sorte le 21 juin, veille de l'ouverture du concile. Jean d'Antioche n'était pas arrivé. Les évêques présents, au nombre d'environ cent-soixante, se plaignaient amèrement de son retard. Le pape ayant désigné saint Cyrille pour son représentant, on n'avait point à attendre les trois légats spéciaux qu'il envoyait d'Italie. Nous avons vu que leurs instruc­tions avaient été données dans la prévision que le concile pourrait être terminé avant leur arrivée. Enfin, le soir du 21, deux évêques syriens, Alexandre d'Apamée et son homonyme d'Hiérapolis en­trèrent à Éphèse, porteurs d'une lettre adressée par Jean d'Antioche à saint Cyrille. Elle était conçue en ces termes : « Au seigneur très-saint et très-religieux collègue Cyrille, Jean, salut dans le Seigneur. Je suis désolé de n'être point encore à Éphèse, où votre sainteté m'attend depuis plusieurs jours. Le désir de vous voir, plus encore que l'importance des négociations pendantes, m'a fait pres­ser mon voyage. Depuis trente jours je suis en route, sans m'accorder personnellement un instant de repos. Mais la maladie de plusieurs des évêques qui m'accompagnent, le mauvais état des chemins, le manque de bêtes de somme nous ont causé des retards infinis. Priez Dieu qu'il nous permette de fournir sans encombre les cinq ou six journées de marche qui nous restent encore, et qu'il m'accorde ainsi la joie d'embrasser votre tête sainte et sacrée. »

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1 Labbe, tom. III, passims Soorat., Hist. eccles., lit. VU, cap. xxxiv.

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Ce billet fut lu à tous les évêques réunis à Ëphèse; et, comme ils se plaignaient du nouveau retard qu'ils allaient encore avoir à subir : « Non, non, s'écrièrent les deux envoyés. Jean d'Antioche nous a chargés expressément de vous dire de ne plus différer l'ouverture du concile. Le vœu de l'empereur est formel ; n'attendez pas da­vantage, et demain commencez la première session. » On leur fit répéter plusieurs fois cette parole ; ils attestèrent par serment que le patriarche leur avait très-réellement donné ce message. En consé­quence, il fut résolu que la première session aurait lieu le lende­main. Nestorius protesta contre cette décision, et le comte Candidien écrivit aux pères pour leur défendre, au nom de l'empereur, d'ou­vrir le concile avant l'arrivée de Jean d'Antioche. Il ne fut tenu aucun compte de cette inhibition tyrannique, et l'on passa outre.


    36. « Le X des calendes de juillet, sous le consulat XIIIe de Flavius Théodose et IIIe de Valentinien, empereurs augustes (22 juin 431), disent les actes, le saint concile s'est réuni à Éphèse, et les très-saints et vénérables évêques, au nombre de cent-soixante, ont siégé dans la basilique de Sainte-Marie, sous la présidence de Cyrille d'Alexan­drie tenant la place du très-saint et très-vénérable pontife de l'église de Rome, Célestin 1. Le diacre de Carthage, Bessula, prit séance, comme représentant de l'église d'Afrique. Pierre, prêtre d'Alexan­drie et primicier des notaires, dit : Depuis que le révérendissime Nestorius a été promu au siège de Constantinople, des nouveautés se sont produites, qui ont scandalisé les fidèles de cette église. Le très-pieux évêque d'Alexandrie, Cyrille, en ayant été informé, lui adressa une première puis une seconde lettre monitoire, remplies toutes deux de témoignages de déférence et de respect pour sa personne. Nestorius refusa d'y obtempérer. Cyrille prit le parti d'en référer à Rome, et il chargea son diacre Possidonius de remettre la correspondance échangée entre eux aux mains du très-pieux Célestin, évêque de l'église romaine. Célestin porta sur cette affaire un jugement qu'il notifia à Cyrille. Depuis lors, la puissance impé­riale, de concert avec l'autorité religieuse, a convoqué un synode à

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1 KupO.î.ou 'A).£?av8fEΫç, ôiétigvto; y.cd tôv tûîiov tou àyiioTaTou xat ocimïouou ip/iemixÔTrou t5v Pw|xaîuv 'Ey.yJïiai'a; Ke>.£5t£vou. (Labb., tora. III, p. 446.)

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Éphèse 1. Nous croyons devoir vous donner avis que nous avons entre les mains tous les documents dont il s'agit, prêts à en faire lecture, si votre piété le juge convenable. — Juvénal, évêque de Jérusalem, prit la parole et dit : Qu'on lise d'abord la lettre adres­sée par les très-pieux empereurs à tous les métropolitains. — Le prêtre d'Alexandrie, Pierre, fit cette lecture. Après quoi, Firmus évêque de Césarée dit : Je prie le très-saint et révérendissime Memnon, évêque de cette cité d'Éphèse, de vouloir bien spécifier exactement le nombre de jours qui se sont écoulés depuis notre arrivée en sa ville épiscopale. — Memnon répondit : Seize jours se sont écoulés, depuis le terme indiqué par la lettre impériale pour l'ouverture du concile. — Cyrille dit alors : Le saint et sacré concile n'a été différé si longtemps que pour attendre les évêques de Syrie. Ce retard a déjà entraîné de funestes conséquences : nous avons eu la douleur de voir mourir quelques-uns de nos frères dans l'épiscopat ; d'autres en grand nombre sont tombés malades. Il nous faut donc, sans plus de délai, procéder à l'examen des matières dogmatiques, et, selon la teneur des décrets impé­riaux, pourvoir, dans l'intérêt de toutes les églises du monde, à la définition des vérités de la foi. — Théodote évêque d'Ancyre se leva et dit : Il conviendrait avant tout de mander le révérendis­sime Nestorius, afin qu'il assiste aux actes synodaux et que la dé­cision à intervenir soit prise en présence de tous et d'un consente­ment unanime, — Alors Hermogénès évêque des Rhinocoruri2, Athanase de Paralia 3, Pierre des Paremboli 4, et Paul de Lampa 5 se levèrent et rendirent successivement témoignage en ces termes : Hier, par l'ordre de votre piété, nous sommes allés trouver le ré­vérendissime Nestorius pour l'inviter à assister à cette session. J'y

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1 Ces expressions sont importantes pour établir que la convocation du concile d'Éphèse avait été concertée entre l ‘empereur et le pape. 'Ercei ovv ix. paoïXixoO xat 6£oçt),oyç veO(j.citoî ^ âyta 0[m7>v <j«y*ex£ÔTrjTai cûvoSoç ÈviauOa. (Labbe, tom. III, col. 4ot.)

2. Rhinocorurœ, dans l'Augustitamnique Ir« d'Egypte, aujourd'hui Farma. — 3. Paralia, dans l'Egypte IIe, à l'embouchure de la juatrième branche du Nil. — 4. Parembolœ, ou Castrum Saracenorum, dans l'Arabie Pétrée. — 5.Lampa en Crète,

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réfléchirai, nous dit-il, et j'irai, si je le juge à propos. Il avait avec lui six ou sept évêques qui nous tinrent le même langage. — Fla-vien évêque de Philippes fît cette proposition : On pourrait déléguer de nouveau quelques-uns des très-religieux évêques, pour lui noti­fier l'ouverture du saint concile et lui mander de s'y rendre. — Cet avis fut agréé. On désigna pour cette mission Theodulus évêque d'Elusa en Palestine, Anderius de Cherronèse en Crète, Theopemptus évêque de Cabasa en Egypte. Epaphrodite, lecteur et notaire du très-pieux Hellanicus évêque de Rhodes, leur fut adjoint comme secrétaire. Le concile leur remit une lettre pour le révérendissime Nestorius. Elle était ainsi conçue : Votre piété a été informée hier de l'ouverture de cette assemblée sainte et catholique. Vous n'au­riez pas dû négliger d'y assister. Cependant, affligés de votre absence, nous vous prions de nouveau de vouloir bien vous y rendre. L'intérêt de l'Église et celui de la foi demandent une décision solen­nelle; de plus, vous connaissez à ce sujet les vœux des augustes empereurs. — Après s'être acquittés de leur message, les députés revinrent et rendirent compte de leur mission en ces termes : Nous avons trouvé la maison du révérendissime Nestorius entourée de soldats en armes. Ayant demandé qu'on le prévînt de notre visite, il nous fut répondu qu'il reposait (îSiâïei xai àvaitauetai), et qu'il avait donné ordre de ne laisser entrer personne chez lui. Nous insistâmes en disant que nous étions délégués par le saint concile, et que nous ne nous retirerions pas sans avoir reçu de lui une réponse. En ce moment, ses clercs vinrent à nous et nous répétèrent la même chose que les soldats. Nous fîmes de nouvelles instances. Alors se présenta le tribun Florentius, de la suite du très-magnifique comte Candidien. Attendez, nous dit-il, vous allez avoir une réponse. Quelques instants après il revint, accompagné d'un des clercs de Nestorius, et nous dit : Je n'ai pu pénétrer jusqu'au révérendissime patriarche, mais on m'a transmis sa réponse. Il se rendra parmi vous lorsque tous les évêques seront arrivés. Voilà la déclaration qu'il ordonne de faire à votre piété. Nous prîmes alors à témoins le tribun Florentius, les soldats et les clercs qui se trouvaient là, et nous quittâmes cette maison. —Après cette déposition, l'évêque de

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Philippes, Flavien reprit : Nous ne devons omettre aucune des formalités canoniques. Hier, le révérendissime Nestorius a reçu une première citation ; aujourd'hui une seconde vient de lui être adressée. Il n'a tenu compte ni de l'une ni de l'autre. Il convient de lui en faire une troisième. — Les pères adoptèrent cet avis. Anysius évêque de Thèbes dans l'Hellade, Domnus d'Opuntium3, Jean d'Hephœstia dans l'Augustamnique 2, et Daniel de Dama en Lybie, avec Anysius notaire et lecteur de Firmus, évêque de Cappadoce, furent choisis pour cette nouvelle mission. Le concile leur remit à l'adresse de Nestorius une lettre plus pressante encore que la première. Au retour, ils dirent : En arrivant à la demeure de Nestorius, nous trouvâmes le vestibule rempli d'une foule de sol­dats armés. Sur notre demande d'être introduits près du révérendissime évêque de Constantinople, on ne daigna pas nous répondre. Nous priâmes du moins qu'on voulût lui faire savoir que nous venions lui faire une troisième citation, de la part du saint concile. Les soldats se jetèrent sur nous et nous repoussèrent violemment. Nous fîmes observer que quatre évêques désar­més n'étaient point à craindre, que nous n'avions aucune in­tention malveillante et que nous demandions seulement une ré­ponse. Après avoir ainsi parlé, et longtemps attendu à la porte, les soldats nous dirent : Vous pouvez rester là jusqu'à demain, s'il vous convient ainsi. Quant à nous, on nous a placés dans ce vesti­bule pour en garder l'entrée, avec ordre de repousser tous ceux qui se présenteraient de la part du concile. — Après cette déposi­tion, Juvénal, évêque de Jérusalem, dit : Les règles canoniques ne prescrivent que trois citations obligatoires. Cependant nous aurions été disposés à en adresser une quatrième au révérendissime Nes­torius. Mais il fait garder sa demeure par des troupes armées qui en défendent l'accès. Cette attitude ne laisse que trop deviner ses mauvais desseins. Il ne nous reste plus qu'à procéder en paix à l'examen des matières dogmatiques. Qu'on récite donc le symbole de la foi, dressé par les trois cent dix-huit pères de Nicée, afin que

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1 Opuntium, Opuntis, dans la Locride, évêché suffragant de Corinthe. — 2.Basse Egypte.

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les doctrines conformes à cette règle immuable soient approuvées, et celles qui s'en écartent frappées d'anathème1. »

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