Darras tome 18 p. 575
7. « Les comtes de Tusculum et de Spolète, Albéric et Lambert profitèrent de la mort de Charles le Chauve pour renouveler leurs tentatives d’indépendance et leurs prétentions à disposer de la couronne impériale. Mais comme auparavant le pontife résista à tous leurs efforts. Furieux de cet obstacle, les conjurés entrèrent à Rome avec une armée, firent soulever la populace, s’emparèrent de Jean VIII et le jetèrent au fond d’un cachot. Le palais patriarcal de Latran tomba en leur pouvoir et fut livré au pillage de la soldatesque. Quelques serviteurs dévoués réussirent à faire évader le pontife. Aussitôt libre Jean VIII fulmina contre les sacrilèges envahisseurs une sentence d'excommunication et d’anathème. Puis il s’embarqua pour les Gaules et arriva à Arles le jour de la Pentecôte 878. De là il se rendit à Lyon, et envoya prévenir de son arrivée le roi franc Louis le Bègue, qui se trouvait alors à Tours. Pour éviter au pontife un trop long voyage, Louis se disposa à partir pour Troyes et fit prier Jean VIII de se rendre dans cette dernière ville où un concile des évêques des Gaules était convoqué. Le pape le présida en personne. Un grand nombre de canons disciplinaires y furent adoptés. On y organisa hiérarchiquement l’église chrétienne qui venait de se former chez les peuples de la Flandre récemment convertis à la foi. Jean VIII sacra les évêques destinés à ce pays. Le pontife exposa ensuite aux pères du concile les attentats commis
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p576 PONTIFICAT DE JEAN VIII (872-882).
contre sa personne sacrée et contre le siège apostolique par les comtes de Tusculum et leurs sicaires. Il donna connaissance de l’anathème prononcé contre eux et en remit un exemplaire authentique que chacun des évêques devait revêtir de sa signature. A la session suivante, qui eut lieu le surlendemain, les évêques s’adressant à Jean VIII lui tinrent ce langage : Très-bienheureux père, souverain pontife de la catholique et apostolique Église romaine, nous, vos fils, serviteurs et disciples, évêques des Gaules et de la Belgique, nous prenons la plus vive part aux injures et aux violences que des hommes pervers ont faites contre vous et contre notre mère, la sainte Église romaine, maîtresse de toutes les autres. Nous nous associons de cœur et d’âme à la sentence qu’en vertu de l’autorité de l’Esprit, du privilège du bienheureux Pierre et du siège apostolique, vous avez canoniquement portée contre les coupables. Nous tenons pour déposés ceux que votre jugement a frappés de déposition, pour excommuniés ceux que vous avez déclarés tels, pour anathématisés ceux que vous avez soumis à l’anathème. S’ils reviennent à résipiscence, nous ne les recevrons à la communion qu’autant que vous les aurez relevés vous-même des censures qu’ils ont encourues. — L’évêque déposé de Porto était présent à cette séance solennelle. On renouvela contre lui le jugement déjà prononcé par le pape. Il fut dépouillé de ses ornements épiscopaux et dégradé de son ordre. Il jura par serment sur les saints Évangiles de ne jamais chercher à retourner à Rome ni à rentrer dans sa ville épiscopale. A cette double condition, le pape usa d’indulgence à son égard et l’admit à la communion laïque. »