Darras tome 21 p. 415
32. Les timides agneaux groupés à Parme, comme à l'ombre du genévrier biblique sous la houlette de l'intrus, ce tableau d'une pastorale simplicité repose des invectives prodiguées par Benzo au pape légitime et aux plus saints personnages de son temps. Nous verrons bientôt les agneaux de Parme se transformer en loups dévorants. Les nouvelles que l'évêque d'Halberstadt apportait à Alexandre II et à Hildebrand n'étaient pas, comme le croyait Benzo, de nature à réjouir le cœur du pape et de l'illustre archidiacre. La prochaine arrivée d'Annon de Cologne en qualité de commissaire royal chargé de prononcer sur une question qui n'était ni de sa compétence ni de celle du roi germain, redoublait au contraire toutes leurs inquiétudes. Bonizo de Sutri et le catalogue pontifical de Cencius nous ont conservé le récit malheureusement trop laconique des événements qui suivirent. Voici leur texte «Annon de Cologne préoccupé de rétablir l'union entre la royauté et le sacerdoce, se rendit en Lombardie, traversa la Toscane et arriva à Rome (vers les derniers jours d'avril 10G4). Admis à l'audience du pape, tout en se montrant personnellement plein de respect et de déférence, il fit au nom de sa cour des observations très-vives. « Frère Alexandre, dit-il, pourquoi sans l'ordre ni l'assentiment du roi mon seigneur avez-vous accepté le souverain pontificat? Depuis plusieurs siècles les rois et empereurs sont en possession du droit de présider à l'élection des papes.» II cita en effet le nom de quelques patrices et empereurs romains qui avaient, disait-il, exercé ce droit et intronisé les pontifes de Rome sur le siège apostolique. — Quand il eut cessé de parler, l'archidiacre Hildebrand ainsi que les évêques et cardinaux présents à l'audience protestèrent contre cette thèse. «Tenez pour certain, vénérable frère, lui dit Hildebrand, que les
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1.III. lie-, xix-, 3.
2. tluiizu, up. Wattericli. Toni. I, p. 2S3.
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canons fixés par les saints pères n'accordent nullement aux rois le pouvoir que vous leur supposez dans les élections pontificales. » Annon répliqua que ce pouvoir découlait de la dignité de patrice, dont les empereurs étaient investis depuis Charlemagne. Hildebrand reprenant alors toute la série des textes canoniques relatifs à l'élection des papes, établit à ce sujet la véritable doctrine de l'Église. Il cita la tentative d'usurpation faite eu 483 par Odoacre et son préfet du prétoire Basilius, la vigoureuse protestation du concile romain tenu en 502 sous le pape Symmaque, alors que Laurent métropolitain de Milan avait dit : « Nous ne pouvons sanctionner un décret qui donne à un laïque la puissance ecclésiastique. Un laïque chrétien a le devoir d'obéir à l'Église et non l'autorité de lui imposer des lois 1. » Dans ce même concile, Eulalius évêque de Syracuse avait formulé la même doctrine en ces termes : « Nulle part nous ne lisons que les laïques, si profondément religieux qu'on les suppose, aient jamais reçu le privilège de gouverner l'Église. » — A ces propositions dont Hildebrand démontra la conformité avec l'enseignement des pères et de toute la tradition, Annon de Cologne répondit en disant que le pape Nicolas II, dans un récent décret, avait concédé nominativement au jeune roi son maître le privilège en question. — Hildebrand fit alors apporter le texte original du décret de Nicolas II, souscrit par les cent quatorze évêques qui avaient en 1059 assisté au synode romain de Latran2. (Ce texte original ne ressemblait nullement, comme nous l'avons dit, à celui des exemplaires interpolés par les schismatiques et répandus à profusion en Allemagne). Une longue controverse s'engagea donc sur ce point ainsi que sur les autres citations canoniques ou historiques, et remplit plusieurs conférences successives. Enfin après un examen approfondi de toutes les difficultés, Annon déclara sa conscience parfaitement éclairée, reconnut la vérité de la doctrine romaine, et cessa toute résistance. Il supplia alors le seigneur pape de convoquer en Lombardie un concile où il daignerait exposer lui-
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1. Cf. Tom. XIII de cette Histoire, p. 499. — Labbe, Concil. Tom, IV, p 1333 1336.
2. Cf. Chapitre précédent N» 32.
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même les faits relatifs à sa propre élection et en démontrerait la légitimité. Bien que cette requête constituât un précédent jusqu'alors inouï, et qu'elle portât une atteinte regrettable à la dignité du pontife romain, Alexandre II, eu égard à la perversité des esprits et à la nécessité de prévenir de plus grands malheurs l'accueillit sur le champ, et par cette concession, se gagna le cœur de ceux même qui jusque-là s'étaient le plus ouvertement déclarés ses ennemis. Des lettres de convocation furent adressées aux évêques de Lombardie, les invitant à se rendre à Mantoue pour les prochaines fêtes de la Pentecôte (31 mai 1064). Ils s'y rendirent tous avec leurs métropolitains, à l'exception de Cadaloüs, qui n'osa affronter le grand jour de cette solennelle assemblée. Alexandre II escorté des évêques suburbicaires et des cardinaux de la sainte église romaine se mit en route et arriva heureusement à Mantoue pour le terme fixé1.»
33. Benzo paraît avoir complètement ignoré cette conférence préliminaire; du moins il n'en dit pas un mot. De Parme où il commandait en sous-ordre les agneaux de Cadaloüs, il se préoccupait surtout du côté militaire de la question et se réservait de jeter au dernier moment son épée dans la balance. « Le pontife Anne, dit-il, à la tête de trois cents chevaliers au casque étincelant, arriva à Mantoue. La comtesse Béatrix fit à cet infidèle représentant du roi de Germanie une réception pompeuse. L'intrus Alexandre informé par les évêques Gunibert de Turin et Grégoire de Verceil des bonnes intentions d'Anne et de Béatrix à son égard 2 n'hésita point à quitter Rome et se rendit joyeusement au concile indiqué. La fortune lui souriait de nouveau et enflait ses voiles. Quant au Prandellus (Hildehrand) toujours défiant, même au sein de la plus complète prospérité, il ne voulut pas courir ce risque 3. Le perfide
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1 Bonizo
Sutr. Ad amie. Lib. VI: Patr.
Lat. T. CL,
col. 830 ; Cod. Archiv.
Vatican, ap. Wattericli, Tom. I, p. 262.
2. Nous venons de voir que le pape Alexandre II n'avait pas eu besoin d'intermédiaire pour être renseigné sur les véritables sentiments de saint Annon de Cologne. »
3. C'est
donc à tort que les collections des conciles (Labbe, Mansi, Hardouin)
interprétant dans un sens
trop étendu le texte du catalogue de Cencius :
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Anne avait adressé au seigneur élu Cadaloüs une ambassade, pour l'inviter à venir lui-même à Mantoue avec l'armée de ses partisans fidèles. Il voulait lui faire croire que le concile n'était réuni que pour reconnaître son droit et le proclamer. « Seigneur père, vous savez pourquoi je suis venu, lui faisait-il dire. Hâtez-vous, venez m'aider à combattre l'ennemi de l'Église. » Mais notre élu apostolique ne fut point dupe de ces trompeuses assurances. Levant les yeux au ciel et versant des larmes amères : « Seigneur, dit-il, je remets mon esprit entre vos mains. » Il se garda bien d'aller à Mantoue, cette nouvelle Babylone, où l'on préparait ostensiblement un trône pour l'intrus. Alexandre y prit place en effet; il adressa aux évêques ses complices une harangue balbutiée sur un ton inintelligible. Le grand prêtre Anne fut obligé d'avertir ce bègue que nul ne comprenait un seul mot des injures qu'il venait tout furieux de débiter durant une demi-journée contre l'élu apostolique. La séance fut donc levée à midi et remise au lendemain. Alexandre escorté de sa horde de Patares se retira triomphant dans la demeure qui lui avait été assignée, pendant que le grand-prêtre Anne vint se prosterner devant le tabernacle en priant et en pleurant. La comtesse Béatrix vint le chercber sur le soir et lui dit : « Seigneur archevêque, l'heure du repas est venue.» Il s'excusa d'abord sur un violent mal de tête, puis comme la comtesse insistait, il lui fit signe d'éloigner ses serviteurs et dit : « Très-pieuse dame, en présence de cet autel sanctifié par le sacrifice quotidien du corps et du sang de Jésus-Christ, je veux vous révéler le secret qui pèse sur mon âme comme un poids insupportable. Vous savez comment le saint empereur Henri III m'a tiré de la poussière pour m’élever au-dessus des princes germains. Tout ce qu'un souverain peut faire pour un sujet, il le fit pour moi, puisqu'il m'avait con-
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Statuto itaque termino, Alexonder exiens ah urbe curn episcopù et cardinalibus ad Mantuam prospère, Domino adjuvante, pervertit, comprennent Hildebrand parmi les personnages qui assistèrent Alexandre II au concile de Mantoue. Il est probable que le grand archidiacre, rassuré dès lors sur les dispositions d'Annon de Cologne, crut nécessaire de rester à Rome, pour déjouer les manœuvres toujours hostiles de la faction schismatique.
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stitué dans son empire comme un autre lui-même. Hélas! pécheur et misérable que je suis, comment ai-je répondu à tant de bonté? Loup ravissant, j'ai arracbé à son auguste mère le fils de mon bienfaiteur, j'ai prêté mon appui à cet Alexandre que les Normands ont promu sur le siège du bienheureux Pierre. A la cour du roi mon seigneur on m'appelle Judas, on me montre au doigt comme un traître. Si je ne répare mes fautes passées on me bannira comme un lépreux. Voilà, sage princesse, l'objet de ma douleur. Prêtez-moi votre appui ; ne repoussez point le malheureux Lazare qui implore une miette du pain de votre sagesse et de votre prudence. » Emue par ce langage, Béatrix lui répondit : « Père, n'hésitez point à prendre le parti que vous trouverez le plus sage; vous pouvez compter sur mon concours.» — Anne poussant alors un profond soupir, reprit : « Noble dame, c'est en vous après Dieu que je mets toutes mes espérances. Voici mon dessein. Je vais m'emparer de la personne d'Alexandre ; je le conduirai à la cour de Germanie. Il n'aura aucun outrage à y subir, je répondrai sur ma tête de sa sécurité. Au besoin je lui abandonnerai mon siège primatial de Cologne; je me ferai son chapelain. Mais le trône apostolique restera au seigneur Cadaloüs, l'élu de mon maître. «Quand il eut ainsi parlé, la comtesse lui répondit : « Frère saint, qu'il soit fait selon votre volonté. Tout ce que vous m'ordonnerez je suis prête à l'accomplir. « A ces mots, Anne transporté de joie, s'écria : « Vous justifiez votre nom de Béatrix en consolant les malheureux. Que le Dieu créateur du ciel et de la terre augmente le nombre de vos jours en proportion du bien que vous faites!» —Le lendemain Anne refusa de se présenter au concile ne voulant plus entendre les bégaiements d'Alexandre. Sur son ordre l'armée des fidèles de Parme dévouée à l'apostolique Cadaloûs se rapprocha de Mantoue. A l'aube du troisième jour, les habitants furent réveillés par nos vaillantes troupes qui parcouraient les rues, agitant leurs armes, sonnant de la trompette et criant: « Où est-il l'Asinaudrellus (Alexandre II), ce fils de Satan, ce tison d'enfer, ce maudit de Dieu et des hommes? » Dans son épouvante l'Asinander n'eut garde de se montrer au synode. Béatrix terrifiée s'évanouit aux
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pieds du grand-prêtre Anne. Le palais retentit de lamentations, la ville était pleine de sang et de carnage. Après une journée de combat, la victoire qui nous avait d'abord été favorable, changea soudain ; la fidèle armée de Parme profita des ombres de la nuit pour opérer sa retraite. Béatrix reprit ses sens avec la victoire : « Vous le voyez, dit-elle à Annon, le ciel lui-même s'est prononcé pour Alexandre II. Résister davantage serait nous exposer à être massacrés par le peuple. De deux maux il nous faut choisir le moindre. » Ainsi parla cette fille d'Eve; ses perfides discours séduisirent l'archevêque de Cologne, qui trahit alors le Seigneur Dieu tout puissant, son christ Cadaloüs et le roi de Germanie notre auguste maître. Le crime fut consommé, la prétendue légitimité d'Alexandre reconnue, l'abomination de la désolation introduite dans le saint des saints. Elle dure encore, ajoute avec désespoir Benzo : l'Asinandrellus triomphe au Latran ; il se fait gloire des lauriers cueillis à Mantoue; il parle du conventicule qui a reconnu sa légitimité comme du plus œcuménique des conciles. Les ignorants courent à lui comme les poissons au vivier; il se fait prêter serment de fidélité sur les évangiles, la croix et l'autel. Nous attendons de Dieu et de vous, auguste roi, la fin de tant de malheurs 1. »
34. Cet appel au bras séculier termine la première partie du pamphlet de Benzo. L'idée de transformer saint Annon de Cologne en généralissime des armées de Cadaloüs, en lui faisant prendre l'initiative de la sanglante attaque qui faillit dissoudre le concile de Mantoue, réuni par ses soins avec tant de labeurs et de fatigues, est un trait de génie. Elle couronne dignement cette œuvre de ténèbres et de mensonge que, malgré notre répugnance et au risque de soulever le dégoût du lecteur, nous avons cru devoir reproduire en entier. La rage des passions déchaînées contre la sainte Église de Dieu, contre la papauté et contre la discipline cléricale, le caractère vraiment satanique de la conjuration des rois, des empereurs, des princes ligués avec un clergé simoniaque et
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1 Benzo, ap. Watterich. Tom. I. p, 290.
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scandaleux, la violence de la tempête soulevée contre le siège apostolique, tout ce tableau des luttes du XIe siècle est vivant et comme frémissant sons la plume du schismatique évêque d'Albe. Il nous fallait donc affronter ce torrent d'injures, de blasphèmes, de vociférations sacrilèges, pour avoir l'idée de son impétueuse fureur. Le monument d'ignominie laissé par Benzo nous fait comprendre la gravité des périls auxquels le génie de la papauté personnifié dans Hildebrand arracha l'Église et le monde.
35. Le concile de Mantoue si horriblement travesti dans le récit de Benzo fut une grande et solennelle assemblée dont il nous faut maintenant rétablir la physionomie véritable. Au défaut des actes qui n'ont point été conservés, les annales d'Altaïch en offrent un résumé impartial écrit par l'un des prélats qui y siégèrent. Voici ce texte dont la gravité magistrale et vraiment digne de l'histoire forme un heureux contraste avec les impertinences romanesques de Benzo. « Le concile de Mantoue fut convoqué pour le jour de la Pentecôte (31 mai 1064). Alexandre et Cadaloüs avaient tous deux promis de s'y rendre. Par l'ordre du roi Henri, l'archevêque Annon de Cologne, le duc de Bavière Othon de Saxe 1, la plupart des princes ecclésiastiques et laïques de Germanie s'y trouvèrent, et avec eux moi Wenceslas abbé du monastère d'Altaïch. Les évêques et les principaux seigneurs d'Italie ayant à leur tête le duc Godefroi de Lorraine et de Toscane y prirent part (on y remarquait aussi la présence de trois évêques espagnols Munio de Calahorra, Eximius d'Oca2 et Fortunius d'Alava, délégués par les autres églises de l'Ibérie 3). Alexandre II arriva pour l'époque fixée. Cadaloüs de son côté quitta la ville de Parme et se mit en route; mais il s'arrêta
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1 Les annales d'Altaïch ne nomment point le duc de Bavière, mais sa présence est mentionnée ainsi que celle de Godefroi de Lorraine par Bonizo de Sutri (ad Amie. Lib. VI; Patr. Lat. Tom. CL, col. 806).
2 Ville épiscopale suffragante de Tarragone qui devait bientôt être ruinée par les Maures et dont le siège transféré une première fois à Gamonal en 1074, fut définitivement reporté l'année suivante à Burgos.
3 Cette mention qui ne se trouve pas non plus dans les Annales d'Altaïch. est empruntée à la collection des Conciles (Labbe, Tom. IX, col. 1180; Mansi, Tom. XIX, p. 1031).
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à moitié chemin dans la petite ville d'Aqua-Nigra, d'où il fit dire à l'archevêque de Cologne qu'il n'assisterait point au synode à moins d'en avoir la présidence. Après s'être consulté avec les évêques, Annon lui transmit cette réponse : « Nous ne pourrons qu'obéir au saint concile et nous conformer au jugement de l'Église. » Cadaloüs resta dès lors à Aqua-Nigra, où de fréquents messages le tinrent au courant de ce qui se passait à Mantoue. Le lundi de la Pentecôte (1er juin 1064), tous les évêques, princes et seigneurs, se réunirent à la cathédrale où une messe solennelle fut célébrée pour implorer le secours et les grâces de l'Esprit Saint. Alexandre prononça ensuite un discours sur la nécessité de mettre fin au schisme et de rétablir l'unité au sein de l'Église catholique. Annon de Cologne prenant alors la parole en qualité de représentant du roi d'Allemagne, exposa les griefs articulés par les ennemis d'Alexandre II contre ce pontife. On lui reprochait d'avoir acheté son élection à prix d'argent, et d'avoir pour se maintenir sur le siège apostolique conclu avec les Normands une ligue hostile aux intérêts de la Germanie. Sur le premier point Alexandre répondit, en attestant la vérité de son affirmation par un serment solennel, que loin d'avoir acheté le souverain pontificat, il avait été promu malgré lui, contre sa volonté et en dépit de toutes ses résistances, par les cardinaux de la sainte église romaine investis du droit canonique d'élire les papes. Quant au second point, relatif aux intérêts du jeune roi de Germanie : «Lorsque ce prince viendra à Rome, dit Alexandre, il se convaincra bientôt de la fausseté d'une pareille allégation ; il verra que nous n'avons rien tramé contre son autorité ni contre ses droits héréditaires. » Tout le concile à l'unanimité déclara que les explications données par le pontife étaient péremptoires. Cadaloüs qui avait refusé de se rendre au concile, fut déposé par tous les suffrages; Alexandre fut reconnu et proclamé légitime souverain pontife. Un cantique d'action de grâces en l'honneur du Dieu tout puissant et du Christ rédempteur termina cette première session. Le lendemain les pères se réunirent de nouveau dans la cathédrale sous la présidence d'Alexandre II. A l'exception d'Annon qui n'était point encore arrivé, tous avaient repris leurs sièges, lors-
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que des clameurs tumultueuses retentirent dans la ville : les partisans de Cadalüs, l'épée nue à la main, firent irruption dans la cathédrale en vociférant contre Alexandre des cris des mort. Les pères s'enfuirent en désordre et le pape demeura presque seul sur son trône. Il allait se retirer lui-même, lorsque sur mon conseil, dit l'abbé d'Altaïeh, il prit la parole et avec une majesté vraiment pontificale contint la rage de cette horde furieuse. Eu ce moment la comtesse Béatrix, à la tête des troupes, arriva sous le portique de la cathédrale et balaya la tourbe des émeutiers. Les pères reprirent alors leurs délibérations interrompues; une sentence d'excommunication prononcée unanimement contre Cadaloüs, mit fin au concile. Le pape Alexandre retourna à Rome et chacun de nous, heureux de voir renaître la concorde entre le sacerdoce et l'empire, revint dans sa patrie 1. »