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91. Eudoxia n'avait garde de suivre un pareil conseil. Vraisemblablement elle traitait ces exhortations de fades et mystique! homélies; elle les livrait à la dérision de ses eunuques ou à la critique jalouse de son évêque favori, Severianus. Quoi qu'il en soit, l'empereur Léon le Sage continue son récit en ces termes : « Plus le médecin spirituel multipliait la douceur et les exhortations, plus cette femme s'acharnait dans son ressentiment. Elle interdit à Chrysostome l'entrée du palais ; et toute la ville fut remplie des éclats de sa colère. Or, la fête de l'Exaltation de la Sainte-Croix étant venue, après que l'empereur Arcadius, entouré de son cortége d'apparat, eut pris place dans la basilique au milieu du peuple fidèle, Chrysostome monta en chaire selon sa coutume et parla sur la solennité du jour avec une éloquence et une onction admirables. Quand il eut terminé son homélie, l'impératrice entourée de ses gardes d'honneur et des officiers du palais arriva au seuil de
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1. Ephes., iv, 26. — 2. Lue., X.,, 20. — 3. Matth.,xn, 28. — 4. S. Joan. Chrj*. MpùL adEudotiam; Oatr. groce., tom. IAIV, col. 491-496.
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l'église. Mais Chrysostome en avait fait fermer les portes, avec défense de les ouvrir sous aucun prétexte à Eudoxia. Il me serait impossible de décrire la rage dont cette femme fut alors saisie. Elle vomit un torrent d'injures contre le saint archevêque, ou plutôt contre Dieu même dont il était le fidèle et courageux ministre. Enfin elle ordonna aux soldats de briser à coups de hache la porte de la basilique. L'un d'entre eux s'élança le premier; il levait déjà le bras, mais à ce moment, frappé d'une paralysie soudaine, le bras sacrilège demeura immobile et le malheureux poussa un cri de douleur. Cet événement extraordinaire frappa de crainte l'imagination de l'impératrice. Elle reprit sur-le-champ la route du palais. Quant au malheureux soldat dont la main était desséchée, il attendit que les saints mystères fussent célébrés et courut se jeter aux pieds de Chrysostome, le priant d'obtenir de Dieu sa guérison. Le saint archevêque intercéda pour lui; aussitôt le bras reprit sa souplesse et son mouvement habituels. Cependant, Eudoxia persistait dans ses projets de vengeance. Elle voulait l'exil de Chrysostome. Arcadius, c'est une justice que je dois lui rendre, s'y opposa énergiquement et continua à témoigner la plus haute estime pour la vertu de Chrysostome 1. » Ainsi parlait un historien couronné, l'empereur Léon le Sage. Son récit nous fait admirablement comprendre les dangers affrontés si résolument par le grand cœur de saint Jean Chrysostome. L'orage s'amoncelait sur sa tête. Le moindre choc allait faire jaillir la foudre.
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(1) Léo Philosoph., Laudat. S. Joann. Chryàost., Ioc, cit.
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CHAPITRE W;
SOMMAIRE,
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(Suite).
§ U LES GHANDS-FaÉRKS.
'. Les documents anciennement connus et l'épisode des Grandg-FrereK —-du 2. Découverte du cardinal Maï. Chronique de Théodore, évêque de Triml-thunte (Chypre). — 3. La veuve Theodotis, le prêtre Isidore et Théophiîa d'Alexandrie. — 4. Lettre du pape saint Innocent 1 à Théophile d'Alexandrie. Réponse du patriarche. — 5. Interdit lancé par le pape contre Théophile. Lettre d'Innocent 1 à Arcadius. — G. Expédition de Théophile contra les monastères de Nitrie, — 1. Émeute à Alexandrie. — 8. Humilité du prêtre Isidore. — 9. Les Grands-Frères et le patriarche de Jérusalem. — 10. Lettre d'Arcadius au pape saint Innocent I. — 11. Lettre d'Arcadius au préteur d'Alexandrie. — 12. Discussion entre Eudoxia et saint jean Chry» eostome. — 13. Intrigues des évêques courtisans. — 14. Arrestation, de» légats pape par Eudoxia. — 15. Achat des consciences par Eudoxia. -• 56. L«* trois évêques hostiles à saint Jean Chrysostome à l'audience impt-riait. — 17. Importance de la chronique inédite de Théodore de Trimi»
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thunte. —18. L'épisode des Grands-Frères tel qu'on le connaissait jusqu'U! d'après le récit da Palladius. — 19. Concordance des récits anciens ave* ealui de Théodore de Trimithunte.
g II. MORT DE SAINT ÉPIPHAN*.
40. Théophile d'Alexandrie et saint Jérôme. — 21. Théophile d'Alexandrie et saint Épiphane. — 21. Conciles de Chypre et d'Alexandrie contre l'origénisme. —iZ. Succès des intrigues de Thécphile. — 24. Voyage de saint Épiphane à Constantinople. — 25. La synaxe à la basilique des Douze-Apûtres. -2G. Saint Épiphane etl'enfaot impérial. —27. Visite de» Grands-Frère» à saint Épiphane. — 2S. Embarquement et mort de saint Épiphane.
§ III. CONCILIAB0LE DD CHÊNE.
29. Attitude des évoques réunis à Constantinople. — 90. Lei quarante Pâques fidèles. — 31. Attitude impassible de saint Jean Chrysostome. «— 32. L'homélie In diviie. — 33. Porphyre, patriarche d'Antioche. — 3t. La faction de Théophile.— 35. Ouverture des sessions au monastère du Chêne. — 36. Mémoire de Théophile contre saint Jean Chrysostome.— 37. Suite du mémoire de Théophile. — 38. Fin du mémoire de Théophile. — 39. Insuccès du premier mémoire de Théophile. —40. Second mémoire d'Isaac et de Théophile contre saint Jean Chrysostome. — 41. Habileté perfide du second mémoire. — 42. Le conciliabule du Chêne et le tri-elinium de saint Jean Chrysostome. — 43. Première citation de saint Jean Chrysostome. Réponse des évêques ses adhérents. — 44. Réponse personnelle de saint Jean Chrysostome. — 43. Le notaire impérial et les deux clercs de Constantinople. — 46. Récit parallèle de Théodor» de Trimithunte. — 47. Une dissidence entre la version de Théodore de Trimithunte et celle de Palladius. — 48. Aquilinus et Théophile. — 49. AquiliDus et saint Jean Chrysostome.—50. Déposition de Chrysostome par le conciliabule du Chêne.
S IV. PREMIER EXIL DE CHRYSOSTOME.
H. Apprêclaïlon des forfaits commis parle conciliabule du Chêne. — C2. Dit> eours d'adieu prononcé par Chrysostome. — 53. Chrysostome se Htm • tei bourreaux et part pour l'cxià.CI.'.
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1. L'étincelle qui devait faire éclater en une explosion formidable les haines et les vengeances contre saint Jean Chrysostome partit d'Alexandrie. Le patriarche Théophile dont le caractère inquiet, ambitieux et tyrannique s'est déjà révélé à nous par l'histoire de ses démêlés avec saint Jérôme, venait de se compromettre gravement dans une lutte nouvelle avec les monastères de Nitrie. Cet épisode local qui eut un retentissement si funeste dans l'histoire n'était jusqu'à ces dernières années que fort obscurément connu. Palladius, Socrate, Sozomène, Théodoret, vivant à Byzance ou à Antioche fort loin du théâtre des événements, ne nous en avaient laissé qu'un récit incomplet, vague, dont la liaison avec le grand drame de Constantinople et l'influence décisive sur son tragique dénouement n'apparaissaient que d'une manière confuse, presque invraisemblable. Le tout se bornait à nous apprendre que les quatre principaux chefs des monastères de Nitrie, Dioscore, Ammonius, Eusèbe et Euthyme, vieillards vénérables, frères selon la nature et la grâce, tous quatre d'une taille majestueuse qui leur avait valu le surnom de Longi-Fratres (Grands-Frères), après avoir été chassés de leur solitude par le patriarche d'Alexandrie, s'étaient réfugiés à Constantinople où ils avaient invoqué la protection de saint Jean Chrysostome. Celui-ci avait accueilli leurs plaintes, consolé leur infortune par la plus généreuse hospitalité, et invité Théophile à venir en personne à Byzance se justifier des accusations portées contre lui. Théophile avait accepté l'invitation, il était venu à Constantinople en accusé. Mais bientôt, appuyé du crédit de l'impératrice dont il servait les instincts de vengeance, il avait interverti les rôles. Devenu à son tour accusateur, juge et bourreau, il avait lancé une sentence d'interdit et de déposition contre Chrysostome. Telle était jusqu'ici la donnée sur laquelle les historiens avaient à travailler. Le plus récent d'entre eux, M. Martin (d'Agde), dont l'œuvre est d'ailleurs si consciencieuse à la fois et si remarquable, n'a malheureusement pas soupçonné qu'il y eût autre chose. M. A. Thierry, nous n'avons pas besoin de le
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dire, ne s'en est pas douté non plus ; en sorte que, bienveillante ou hostile, la critique des historiens flottait toujours dans l'inconnu, au milieu de difficultés insolubles et de problèmes inextricables. Au point de vue canonique, il était impossible d'admettre que le patriarche d'Alexandrie, le titulaire le plus élevé de tout l'univers catholique après le pontife romain, eût pu être cité cano-niquement au tribunal du métropolitain de Constantinople, lequel, selon l'ordre établi par le concile de Nicée, ne venait qu'au cinquième rang dans la hiérarchie ecclésiastique. On croyait, il est vrai, atténuer cette difficulté, les uns en affirmant que, dans son ambition d'omnipotence, Chrysostome avait une fois de plus enfreint toutes les règles canoniques à l'égard de Théophile d'Alexandrie, les autres en soutenant que Chrysostome, par un sentiment de charité tout apostolique, s'était mêlé à ce différend pour concilier les deux partis, éviter de plus grands scandales et rétablir la paix. De part et d'autre on en était donc réduit à une appréciation arbitraire qui ne s'appuyait au fond que sur les mêmes récits diversement interprétés, et laissait subsister toutes les difficultés principales. En effet, Chrysostome n'avait aucune espèce de juridiction canonique à exercer sur le patriarche d'Alexandrie, son supérieur hiérarchique. Citation régulière ou simple admonition fraternelle, ces deux procédés étaient absolument nuls vis-à-vis de Théophile. Une des règles les plus connues et les mieux observées à cette époque statuait qu'une accusation contre un évêque devait être jugée en première instance par le concile de la province, et en appel par le pape au jugement duquel étaient de droit réservées toutes les causes majeures. Nous avons précédemment cité cette disposition canonique. Théophile la connaissait aussi bien que Chrysostome. En supposant que Chrysostome, par un zèle mal entendu ou par un abus de pouvoir indigne de son éminente sainteté, se fût permis une démarche contraire au droit ecclésiastique, Théophile n'était pas homme à s'y prêter le moins du monde. Il eût au contraire protesté contre l'immixtion intempestive du métropolitain de Constantinople, et jamais il n'eût quitté Alexandrie pour venir se faire juger à Byzance.
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2. Telle était la difficulté qui préoccupait tous les esprits sérieux, à propos de cet épisode des Grands-Frères demeuré pour Baronius aussi bien que pour les Bollandistes un point d'interrogation suspendu au milieu de la période la plus intéressante et la plus décisive de l'histoire de saint Jean Chrysostome. Cette lacune hagiographique, comme tant d'autres du même genre, déconcertait la science impartiale; mais elle servait admirablement les adversaires de la suprématie romaine en laissant croire qu'au Ve siècle la prééminence doctrinale, administrative, gouvernementale ou disciplinaire du saint siège n'existait pas, en Orient du moins, et que les rênes du pouvoir ecclésiastique flottaient au hasard tantôt entre les mains des illustres génies qui se trouvaient alors investis d'un titre épiscopal, tantôt entre les mains des titulaires de quelque grand siège tirant son importance exclusivement du fait de la résidence impériale. Combien de fois, méditant nous-même sur cet épisode dit des « Grands-Frères, » nous avons lu et relu les pages de Socrate et de Sozomène, de Palladius et de Théodoret, sans y trouver la lumière que nous cherchions! Il était réservé au cardinal Maï de nous apporter enfin la solution du problème. Le savant cardinal eut le bonheur de retrouver dans la bibliothèque du Vatican, sous le numéro 866, un manuscrit renfermant le texte grec d'un ouvrage de Théodore évêque de Trimithunte en Chypre, intitulé : Pepi tôt Bior kai ths esopias kai TÛN eAIYEQN IQANNOr TOT MAKAPiQTATOÏ TOV XPrSOSTCMOr, De vita et exsilio et afflictionibus Joannis beatissimi Chrysostomi. Théodore, l'évêque de Trimithunte dont il est question ici, vivait un siècle et demi après saint Chrysostome. Il avait recueilli toutes les pièces officielles relatives à !a persécution et à l'exil du grand docteur. Malheureusement son ouvrage, comme celui de Théodoret qui se retrouvera peut-être un jour, demeura complètement inconnu jusqu'à ce que le jardinai Maï l'eût inséré au tome VIe 1 de son immor-
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1 Mal, BibHothtca nova Patrum, tom. \\, pag. 263. — M. l'abbé Migne, dont nous ne saurions trop louer les travaux et le zèle, a reproduit le teste grec de Théodore de Trimithunte et la version latine qu'en a donnée le cardinal Maï, Pair. greee.,lom. XLVII, col. 56-87.
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telle collection des Pères inédits. Nous allons donc pour la première lois traduire en français ce document d'un prix inestimable et faire connaître la vérité sur l'incident fameux des Grands-Frères.
3. « Il y avait à Alexandrie, dit Théodore de Trimithunte, une chrétienne fervente nommée Théodotis, sœur du préfet de la ville. Cette pieuse femme remit au prêtre Isidore, administrateur du xenodochium (grand hôpital), une somme de mille pièces d'or 1, à la condition expresse que cette offrande vraiment royale serait exclusivement consacrée à secourir les pauvres de la cité. Isidore était pieux et discret. Il avait reçu jadis l'ordination sacerdotale des mains du grand Athanase. Sa vie était exemplaire. Le patriarche Théophile faisait alors des constructions superbes dans les dépendances de sa basilique et avait besoin d'argent. Il manda le prêtre Isidore et le somma de lui dire la vérité au sujet du bruit répandu dans la ville à l'occasion des récentes largesses de Théodotis2. Elle m'a en effet remis cette somme énorme, répondit Isidore : mais elle m’a fait jurer de n'en pas distraire une obole, et de l'employer toute entière à secourir les indigents. — Et comme le patriarche voulait tout savoir, il insista pour connaître les termes exprès dont la donatrice s'était servie. Elle m'a dit, ajouta Isidore, qu'il valait mieux secourir les pauvres que d'élever, comme vous le faites, de somptueux édifices. — Cette réponse et le refus opposé par le courageux prêtre à la criminelle condescendance qu'on lui demandait exaspérèrent le patriarche. La perte d'Isidore fut résolue. Théophile imagina d'intenter contre lui une accusation infâme. Il la rédigea lui-même et la fit écrire par une main étrangère. Puis mandant de nouveau le pieux abbé: Isidore, lui dit-il, voici un mémoire qui m'a jadis été remis contre vous. Je l'avais complètement perdu de vue. L'autre jour, en cherchant d'autres pièces, je l'ai retrouvé. Prenez-en connaissance. — Seigneur pape, répondit l'homme de Dieu après avoir parcouru des yeux le libelle diffama-
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1 Environ cent mille francs de notre monnaie.
2.'EYpai]/ev xaià toû àêëô 'IstSûpou coSo[nv.r,v xaîYivopfa-». (Tlieodor. Trimi-Oinnti, De viiaet exsilio S. Joann. Chrysost., § V, Pair, grœc, tom. XJ.VU, ,44.66.)
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toire, vous aviez oublié cette accusation. Mais vous rappelez-vous du moins le nom de l'accusateur? — Oui, répondit Théophile. Je le connais parfaitement et nous le trouverons au besoin. — Or, le patriarche s'était prémuni de ce côté. Il avait mis sa sœur dans le secret de cette fourberie et l'avait chargée de lui procurer un faux témoin. L'habile confidente s'adressa à une pauvre veuve; elle lui remit une somme considérable à condition que la veuve subornerait son fils, jeune adolescent, qui viendrait soutenir l'accusation calomnieuse. Mais cette veuve était une honnête femme et une pieuse chrétienne. Elle avertit immédiatement Isidore et lui montra l'argent ainsi que les autres offrandes au prix desquelles on avait voulu acheter sa conscience. Théophile, ignorant cette circonstance, poursuivit le procès canonique. Mais, en séance solennelle, Isidore produisit pour sa justification le témoignage même qu'on avait cru préparer contre lui. Le patriarche dans sa fureur interrompit la discussion, et fit flageller le vertueux prêtre. Baigné dans son sang, Isidore fut jeté devant la porte de l'église. On le croyait mort, mais il revint à lui, et, quittant Alexandrie, se réfugia dans les montagnes de Scété. Elles avaient été le premier théâtre des vertus de son adolescence, elles devenaient l'asile de sa vieillesse outragée 1. »
4. « Après une pareille scène de violence, les dix évêques qui avaient assisté au jugement d'Isidore rompirent tout lien de communion avec le patriarche. C'étaient Jean de Termuthis, Zosime de Sethros, Alexandre d'Osyrinque, Chérémon de Péluse, Nonnos d'Athriba, Dulcetes de Paralis, Serapion de Panis, et les trois prélats lybiens : Clément de Marmarique, Lucien de Parseio et Menas de Dama. Vingt membres du clergé d'Alexandrie, prêtres et diacres, se joignirent à eux. Réunis en synode, ils dressèrent un procès-verbal des faits et une accusation juridique contre le patriarche. Le tout fut envoyé par eux à Innocent, pape de Rome, afin qu'il pût formuler un jugement en vertu de son autorité universelle : '£ieiJ.'f""u œJTriv *ï; "P<Jnr,v IwoxiVtfy» tû rcârâ,îv' a-j-ur,v npiÇv] y.dM.v.û;
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1. Théodore Triiaithunt., De vita, exailio et affiictionibus S. Joann. Ckrysott., - v : l'atr. grœc, tom. LXVil, col. 57.
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p462 PONTIFICAT DE SAISI INNOCENT I (401-417).
Cependant Isidore vivait en paix dans les montagnes de Nitrie, laissant àDieu qui voit tout le soin de sa propre défense. Le patriarche, au contraire, informé de la dénonciation canonique faite contre lui, était rongé d'inquiétude et ne savait quel parti prendre Or, le pape Innocent, après avoir pris connaissance du mémoire synodal, écrivit au patriarche d'Alexandrie une lettre conçue en ces tenues: «Innocent, évêque de Rome, à son frère Théophile. On articule contre vous des accusations de la nature la plus grave. Si les faits sont tels qu'on les expose, je les condamne formellement et je déclare que vous avez agi en tyran non en pasteur. Veuillez donc désormais conformer votre conduite aux règles des saints canons, et réparez les fautes que vous pouvez avoir commises. Autrement je serais forcé de convoquer le synode romain et de prononcer un jugement contre vous. — Le patriarche répondit à la lettre pontificale par la suivante: Théophile, évêque du siège fondé par saint Marc, à Innocent, pape de Rome. Je ne cesserai jamais de lutter contre les ennemis de l'Église. Si vous accueillez les calomnies que mes adversaires vous adressent contre moi, vous compromettrez votre autorité sans aucun profit pour la justice. Moi aussi je préside un siège épiscopal que la majesté évangélique environne. Je compte par centaines les évêques qui relèvent de moi. Je les réunirai pour me défendre et protester contre l'iniquité de vos censures. Adieu et changez de sentiments. Sinon, adieu encore, mais attendez-vous à d'amers regrets 1. »