Les juifs 18

Darras  tome 31 p. 26


22. Les fatales divisions de l'Occident avaient leur contre-coup dans les provinces orientales. C'est ainsi que les Français perdaient la place inappréciable de Dyrrachium, une porte ouverte sur ces contrées de l'Europe et de l'Asie que sillonnèrent trois cents ans les étendards de l'Eglise et de la France. Sans qualité, sans titre d'aucune sorte, Louis II d'Anjou la cédait à l'un des habitants, fanatique partisan de l'antipape. Du même coup, il la vouait au schisme et la dérobait au jeune roi Ladislas. Le pape Boniface, pour châtier l'usurpation et prévenir l'apostasie, invitait un prince catholique, George Stralimir de Rascie, à s'emparer de cette ville, qu'il lui donnait en fief, comme suzerain du royaume de Naples et de ses dépendances5. Or, telle était la dévotion de Stralimir envers le Saint-Siège qu'il s'en déclara le vassal pour ses états même héréditaires. Il statua par un acte additionnel que, sa postérité venant à s'éteindre, la  Rascie dès lors   appartiendrait   directement à

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  1. 1. Ext. in biblioth. cardin. BarberiDi, num. 2303. 

2.Bohifac, Epist., il, pag. 103.

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p27 CHAP.   I.   —   LA   D0CTII1NK   ET  LA   SAINTETÉ,   LTC.


l'Eglise Romaine. Sur les vagues confins de l'ancienne Macédoine et de la Dalmatie, d'autres guerres menaçaient d'achever un état social miné déjà par la corruption, l'ignorance et la barbarie. Dans leur aveugle rage, les factions en étaient venues au point d'enrôler les Turcs sous leurs bannières rivales. Le vrai pasteur universel ne pouvait garder le silence ni rester dans l'inaction devant un tel spectacle :  il enjoignit à l'archevêque d'Antibari de se mettre immédiatement à l'œuvre, d'employer tous les moyens,  comme légat  du  Saint-Siège, pour arrêter ces lamentables dissensions, pour empêcher surtout que les mortels ennemis du christianisme n'en fussent établis les exterminateurs par les chrétiens eux-mêmes1. Avaient-ils besoin de ces téméraires appels et de ces impies connivences pour fondre sur leur proie ! N'était-ce pas assez des ineptes et lâches complicités de la cour byzantine? Si les chrétiens dégénérés ne repoussaient pas toute alliance avec les Turcs, ils ne perdaient guère une occasion de manifester leur haine contre les Juifs. Cette haine semble avoir des explosions périodiques; on la voit éclater tantôt sur  un   point,  tantôt sur un autre,  mais toujours provoquée par les mêmes raisons. En 1391, c'est dans la capitale de la Bohême qu'elle sévit. Des Israélites, entraînés par leur fanatisme héréditaire, ayant excité des enfants chrétiens à blasphémer contre la divine Eucharistie, dont ces jeunes âmes venaient de se nourrir, le peuple se soulève, incendie leurs maisons et massacre tous ceux qui lui tombent sous la main2. Aucun peut-être n'eût échappé, sans la courageuse intervention des ministres mêmes de la Religion qu'ils voulaient anéantir.

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