Sac de Rome et de l'Italie

Darras tome 42 p. 574

 

16. Il ne suffit pas d'entrer à Rome par les armes, il faut s'y établir, et n'y mit-on qu'un campement provisoire, il faut essayer au moins de tenir ses promesses de garanties. C'était l'hypocrite toquade des Cavouriens; une fois maîtres de Rome, ils devaient combler l'Eglise de bienfaits, ils devaient l'en accabler au point de lui rendre facile l'ingratitude. Un capitolalo de Ricasoli, nous dirions un projet de loi, avait essayé de faire sortir des nuages, ces splendides promesses. Le 13 Mars 1871, le gouvernement publia une loi de garanties. Cette loi est partagée en deux titres : le premier pour les prérogatives du Saint-Siège, le second pour les relations en Italie de l'Église et de l'État. Les prérogatives du Pape sont énumérées en 14 articles : la personne du Pape est inviolable et sacrée; les injures qui lui sont faites sont punies comme les injures à la personne du roi; le Pape jouit des hon­neurs souverains et du droit de conserver ses gardes de corps ; le Pape reçoit une dotation de 3, 225, 000 livres, inscrite au grand livre, exempte de toute taxe; il continue à jouir des palais apos­toliques; durant le conclave, les cardinaux jouissent de la même inviolabilité; aucun officier public ne peut requérir dans les palais à l'usage du Pape et du conclave; la publication des actes ponti­ficaux, l'envoi des légats et des nonces participent à l'immunité du pape; les séminaires, académies, collèges, et autres instituts catholiques sont soustraits à l'ingérence civile. La légation apos­tolique de Sicile est supprimée. Les ecclésiastiques jouissent de garanties assurées aux autres citoyens par les statuts. Les évoêques ne prêtent plus de serment au roi. L'exequatur et le placet sont abolis, excepté pour les provisions bénéficiaires et la dispo­sition des biens ecclésiastiques. L'autorité judiciaire décide sur la valeur légale et l'autorité juridique des actes de l'autorité ecclésiastique. Il sera pourvu par une loi ultérieure à la pro­priété ecclésiastique, à la création des êtres juridiques qui ont le droit de la représenter, à la distribution entre eux du patri­moine ecclésiastique. Telle est, en substance, la loi des garan­ties.

 

   On voit, par cet abrégé de la loi, le programme des Savoyards.

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   En apparence, il n'est question que de donner franches coudées au pape et de lui assurer tous les bénéfices d'une souveraineté absente. Dans la réalité, on trouve, sous ces stipulations de belles apparences, tout le poison des légistes, toutes les tyrannies de Bysance. L'Église n'est pas une société complète et par­faite ; elle n'a point droit à la propriété, à la disposition de ses biens et à la pleine liberté de son administration. Ce n'est pas le droit divin qui règle sa condition sur la terre; c'est le droit civil et ce droit humain va à l’encontre du droit divin. L'État fait à l'Église sa part; il la lui fait belle aujourd'hui; il pourra la lui retirer demain. Les propriétés qui lui appartiennent, ne sont pas à la disposition des évêques; elles sont représentées par des corps juridiques de création civile et César se fait sacristain. La loi des garanties, c'est la constitution civile de la papauté.

 

Pie IX répondit à cette loi de garanties, d'abord par une lettre au cardinal Vicaire, pour en démontrer l'astuce et l'absurdité, puis, par une Encyclique. « Le gouvernement subalpin, dit-il, tandis que d'une part, il s'empresse de rendre cette ville la ri­sée du monde, de l'autre, pour éblouir les catholiques et calmer leurs anxiétés, s'est donné la peine de composer et de fabriquer certaines immunités futiles et certains privilèges, qu'on nomme vulgairement garanties, dans le but qu'elles nous tinssent lieu du pouvoir temporel, dont, par une longue série de trames per­fides et par des armes parricides, il nous a dépouillés. » Le Pape déclare donc solennellement, à l'univers entier, que ces prétendues garanties, titres, honneurs, exemptions, privilèges « ne peuvent avoir aucune valeur pour assurer le libre et indé­pendant exercice du pouvoir qui a été divinement constitué pour protéger la liberté nécessaire à l'Église. » A l'appui de cette décision, le pape donne deux raisons : la première, c'est que lui qui a été établi interprète du droit naturel et divin dans tout l'univers, reçoive des lois et des lois qui touchent au gouverne­ment de l'Église universelle, et dont le maintien et l'exécution n'ont d'autre base que le droit prescrit et constitué par la vo­lonté des pouvoirs laïques; la seconde, c'est qu'en ce qui con-

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cerne les rapports de l'Église avec la société civile, le pape a reçu directement de Dieu, dans la personne du bienheureux Pierre, les prérogatives et les droits, aussi bien que la liberté de l'Église, qui sont le fruit et la conquête du sang de Jésus-Christ. Le Pape se réfère, en outre, à ce qu'il a dit cent fois sur le conseil de la divine Providence relativement au principat civil des Pontifes Romains; sur la constitution historique et tra­ditionnelle de ce pouvoir; sur les garanties qu'il offre à l'indé­pendance de l'Église, à la liberté des nations et à la paix du monde. En conséquence, il rejette, réprouve, condamne cette loi, qui, sous apparence de garantie, n'est qu'une charte de servitude, une marque de captivité, un registre d'écrou.

 

   17. Après l'entrée à Rome par la violence et par la violation de tous les droits, le gouvernement piémontais, pour transpor­ter son siège de Florence à Rome, eut pu s'accorder des délais, bâtir un palais royal et des ministères dans l'immense enceinte de la ville éternelle. Un gouvernement simplement honnête n'eut eu, pour ces constructions nécessaires, utiles ou conve­nables, que l'embarras du choix. Les Savoyards trouvèrent plus commode, plus économique et plus facile d'agrandir leur voie d'iniquité. Déjà, pour donner au roi une résidence, ils avaient crocheté les serrures et forcé les portes du Quirinal. Maintenant pour assurer aux ministères un siège et aux finances, des ressources, ils mettent la main sur les couvents. Procurer de l'argent aux caisses de l'Etat, rien de plus simple : on prend le bien d'autrui, on vend les immeubles et on met dans sa poche le prix de vente. De la part d'un particulier, ce serait le vol en petit; de la part d'un état, c'est le vol en grand, c'est le bri­gandage élevé à la hauteur d'une institution, à la dignité d'une loi. Les barbares n'y mettaient pas ces façons; ils pillaient; les modernes libéraux s'autorisent eux-mêmes au pillage, s'adju­gent le fruit de leurs larcins et se croient très innocents, parce qu'ils ont d'abord écrit sur du papier leurs exploits ravisseurs; sous l'euphémisme des formes   parlementaires, ce qui se

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recommence à  Rome, c'est  l'œuvre   des   Visigoths   et   des Sarrazins.

 

En même temps qu'il publiait la loi des garanties, par un coup de force qui en faisait un acte de dérision, le 11 Mars 1871, le gouvernement portait un premier décret d'expropriation contre huit couvents ; 1° Des Oratoriens à Sainte Marie della Vatticella ; 2° Des Cordeliers à l'Église des Saints Apôtres; 3° Des religieuses de S. Sylvestre in capite ; 4" Des Lazaristes, à S. Sylvestre du Quirinal ; 5. Des Augustins à Sainte Marie déella Vergine ; 6° Des Théatins, à S. André déella Valle ; 7° Des Domi­nicains à Sainte Marie sur Minerve ; 8" des Augustins. D'un trait de sa plume, non moins glorieuse que son épée, Victor-Emma­nuel bâtissait huit ministères. Les contes flamands parlent d'un Ulenspigel qui se flattait de fabriquer une paire de souliers en cinq minutes; il empruntait, pour cette opération, une paire de bottes, dont il coupait les tiges. C'est le procédé du Savoyard pour construire, par enchantement, des ministères. A la vérité, ces opérations prestigieuses s'effectuent par expropriation pour cause d'utilité publique ; mais si l'expropriation n'implique pas préalablement une juste indemnité, l'expropriation n'est que la main mise sur le bien d'autrui. L'état italien fixa, il est vrai, le prix d'une indemnité à intervenir ; en réalité, ce prix n'en­tra jamais dans la caisse des véritables propriétaires, les re­ligieux dépossédés. Indépendamment de cette question de pro­bité, les maisons des généraux d'Ordres intéressaient, au plus haut degré, le gouvernement de l'Eglise et la bonne tenue des institutions monastiques. Eu égard à l'intérêt évident des puis­sances, les généraux adressèrent, à leurs représentants, un mé­morandum. Les maisons généralices, les couvents, les églises, les procures, les noviciats, les collèges et les hospices, n'étaient pas une proie que pussent s'adjuger les libéraux et les radicaux de la péninsule. «Les divers établissements, disent les généraux, avec les biens qui leur appartiennent, avec les œuvres princi­pales qui s'y rattachent, portent évidemment le caractère le mieux marqué d'internationalité ; ils sont, pour l'Église romaine

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et pour la catholicité tout entière d'une utilité générale et d'un intérêt universel. Et dès lors, les confisquer au profit du gou­vernement italien et du municipe romain, c'est violer, c'est fou­ler aux pieds, non seulement les titres sacrés de propriété légi­time, mais encore les droits spirituels et les libertés essentielles du souverain pontife et de tous les évêques. » C'est l'évidence même. Au lendemain du jour où l'on offre, au pape, les garan­ties inscrites dans une loi, les supprimer, c'est une déraison et une impudence qui ne relèvent que du fouet.

 

Le Pape ne peut manifestement pas gouverner l'Église à lui seul, il lui faut des coopérateurs et des auxiliaires. « Tous ces actifs auxiliaires du gouvernement spirituel pontifical se verront dans l'impossibilité de remplir leur importante mission, d'exé­cuter leurs utiles travaux, si on les dépouille des fondations, des ressources qui servent à les nourrir et à les entretenir, si on les expulse des monastères et des maisons qui les abritent, si on confisque leurs bibliothèques, leurs archives, leurs trésors d'ar­chéologie sacrée. De plus, ils devront renoncer à se préparer des seconds, des aides, des substituts, des successeurs, si on leur enlève leurs noviciats, leurs collèges, leurs universités, leurs académies, si l'on supprime leurs couvents, leurs maisons-mères, leurs instituts. Les hommes de science, d'expérience et d'éru­dition ne s'improvisent pas. » Supprimer ainsi les maisons gé-néralices, c'était donc attenter à la liberté et à l'indépendance du souverain ponlife, c'était lui arracher des mains les moyens les plus puissants, les plus efficaces du gouvernement de l'Eglise.

 

18. Les raisons n'ont pas de prises sur les insensés et le droit ne touche pas les brigands. Après l'exécution des généraux d'ordre, ce fut le tour des religieux. Le 13 Juin 1873, l'Attila li­béral de Rome sanctionnait une loi contre les ordres religieux. La loi impie du Piémont l'eut autorisé à ce vol en grand ; par un cynisme qui ne s'explique pas, quand l'ancienne loi pouvait suf­fire, on en bâcla une nouvelle. Cette loi institua une junte dont la mission était de confisquer el d'administrer les biens des cou­vents. Du 20 octobre au 16 décembre 1S73, cette junte s'empara

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de soixante-dix maisons religieuses ; elle fit ce que nous avons vu depuis en France, à l'expulsion des religieux. A Rome aussi, la chose n'alla pas sans violence. Le pape avait défendu d'ou­vrir les portes ; les agents de Victor-Emmanuel l'Excommunié, les brisèrent. Le couvent des Camaldules de saint Antoine et des carmélites de sainte Thérèse furent violés de cette façon. Quand les pinces et la hache eurent joué leur rôle, un secrétaire du Cardinal Vicaire lut la protestation suivante : «Maintenant que le sacrilège attentat est consommé, maintenant qu'à coup de hache et de marteau, on a renversé les portes du refuge sacré des vierges du Seigneur, foulant ainsi aux pieds les droits sacrés de la propriété et de la conscience, je proteste au nom de la reli­gion outragée, au nom de l'humanité, au nom de ces pauvres femmes sans défense. » Les moines dépouillés de leurs biens, devaient recevoir une rente de cinquante francs, s'ils étaient laïques. Les objets précieux, les livres furent déclarés propriété de l'État. Dans un coin du couvent, on laissa quelques cellules à la disposition du recteur de l'Eglise appartenant au couvent; le recteur pouvait y habiter avec quelques religieux qui l'aidaient dans son service, mais avec la réserve qu'ils ne porteraient pas l'habit de leur ordre. Parmi ces innombrables attributions de souverain libéral, Victor-Emmanuel, avait ou du moins croyait avoir le droit de régler le costume des moines. Les Jésuites seuls étaient absolument exclus et bannis : il fut même défendu aux recteurs du Gesu et de Saint-Ignace de permettre aux pères de la compagnie de prêcher ou de confesser dans ces sanctuaires créés par eux, où reposent les corps de leur fondateur et de leurs saints et qui furent pendant des siècles, le siège de leur apostolat. Dans la crainte de disputes avec les gouvernements étrangers, les généraux d'ordres répandus en dehors de l'Italie, furent exceptés de la loi d'expulsion. Par suite de ces ordon­nances, les noviciats se vidèrent et comme la loi militaire obli­geait les clercs au métier des armes, c'était, pour les ordres reli­gieux, la mort à bref délai. Mais, par une sorte d'ironie de la Providence, la France allait expulser aussi ses religieux et c'est

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en Italie, sous le couvert de la loi libérale, que plusieurs iront transporter leurs noviciats. Les noviciats de France fleuriront en Italie; les noviciats d'Italie pourront venir en France. Les moines sont éternels.

 

Ces rigueurs montrent à quel degré est descendue l'imbécillité des gouvernements. Les ordres religieux représentent la morti­fication, le désintéressement, le zèle apostolique. Le monde les hait à cause de Jésus-Christ; et, pour innocenter sa haine, se plait à leur imputer des torts chimériques. Mais quel mal ont donc fait, au monde, les conseils de l'Evangile? A l'exception des missionnaires, apôtres de la foi chrétienne chez les bar­bares et chez les sauvages, qui en est mort? On a bâti des égli­ses et des couvents : n'y eut-il que cela, l'industrie y a plus ga­gné qu'à la construction, encore attendue, des phalanstères. Des hommes et des femmes se sont voués à la vie religieuse : qui les a contraints ? Quel tort fait le jésuite à ses concitoyens? Quel tort fait la sœur de charité à ses malades? Quel tort fait la reli­gieuse du Bon-Pasteur à la prostituée devenue, par ses soins, repentante et pure? Quel tort fait le frère des écoles aux enfants de sa classe? Quel tort vous font le chartreux, le trappiste, le dominicain et tous les autres? Leur vie ne vous convient pas; croyez-vous que la vôtre leur convienne, et si vous les proscri­vez pour cette divergence d'humeur, que diriez-vous s'ils vous proscrivaient à votre tour? Le tort est nul et plus que compensé; le bien est immense et de tout ce bien, le peuple a principale­ment recueilli le fruit. Les pauvres ont été instruits, assistés, consolés. Les proscripteurs, qui ont-ils consolé, qui ont-ils assisté, qui ont-ils nourri? En attendant qu'ils aient banni de ce monde la maladie, la pauvreté et la souffrance, il y a des infir­mes, des affamés, des abandonnés : faut-ils qu'il meurent? Quand ils auront ramené l'âge d'or, nous verrons si les religieux sont encore nécessaires ; jusque là que ces brutes respectent les couvents! Eux qui ont tant d'attention pour les grandes fortunes, pourquoi jalouser la pauvreté des monastères? Et puis­qu'ils trouvent bon d'autoriser les maisons de débauches, par

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quelle contradiction infâme voudraient-ils supprimer le toit des vierges de Jésus-Christ.

 

10.Cette guerre aux couvents, depuis Luther, est le trait commun des persécuteurs ; c'est un attentat à la liberté individuelle, à la liberté des vocations, à la liberté des professions, à la liberté de la conscience et du culte, à toutes les libertés constitutionnelles du libéralisme. Par là, le libéralisme se met en contradiction avec lui-même et ne montre que mieux le fond de son cœur. Ce n'est point la liberté qu'il établit, c'est l'oppression des âmes et il l'agrée parce que, au fond, le libéralisme c'est une forme politique du satanisme, la guerre infernale à Jésus-Christ et à ses plus fervents prosélytes. De la part d'un chrétien, cette proscription des religieux et des vierges, ce serait la marque de l'apostasie, si ce n'était l'obstination dans l'anathème. C'est monstrueux, et pourtant il y a pire. Les libé­raux se disent partisans des lumières, amis des sciences, pro­pagateurs des bonnes méthodes et poursuivants de tous les progrès. Dès lors les libéraux doivent favoriser les collèges, soutenir les Universités et encourager le haut enseignement. Or, il existait à Rome, depuis trois siècles, une université de la plus magnifique illustration; elle avait compté des génies dans ses chaires; elle avait répandu ses doctrines jusqu'aux extré­mités du monde. En arrivante Rome, par un trait d'ignominie qui eut révolté les barbares et que réprouverait Platon, les Piémontais mirent la main sur cet établissement. Cette main-mise est un grand forfait.

 

Les supérieurs des divers collèges établis à Rome, protes­tèrent contre cet abominable crime. Qu'on les écoute : cette parole calme fouette, en plein visage, la face impudente du persécuteur : « Le collège romain est un institut fondé par les papes avec l'argent de l'univers catholique, dans le but de ser­vir d'école centrale pour les jeunes gens des diverses nations chrétiennes; et les collèges particuliers,- dirigés par les soussi­gnés, y envoient leurs jeunes gens, non seulement parce qu'ils y trouvent un enseignement excellent, mais encore parce que

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ces collèges ont été fondés à cette fin de recevoir l'instruction dans cette école centrale, fondée par les souverains pontifes, pour la chrétienté tout entière. — A ce motif de droit s'en joint un autre, non moins important, de fait. Car, le collège romain, depuis trois siècles qu'il existe, a toujours été illustré par des maîtres éminents, à commencer par Bellarmin, Tolet, Suarez, Lugo, Kircher, Boscowich et plusieurs autres anciens jusqu'aux Pères Perrone, Secchi et autres qui l'illustrent en ce moment. De sorte que ce collège a répondu pleinement au but de sa fondation. » Pour ces causes, le Collège romain, par raison de droit international, appartenait à l'univers catholique, et par le fait, répondait au but des fondateurs. Cette lettre fut adressée au lieutenant général, La Marmora; elle portait la signature des recteurs Seinhuber, du collège germanique; O'Callaghan, du collège anglais; Grant, du collège écossais; Roëlants, du col­lège belge; Brichel, du collège français; Santinelli, du collège américain; et Séménenko, du collège polonais.

 

Cette lettre étant restée sans effet, une autre fut adressée au commissaire royal, Thomas Lanza. On y rappelait l'argument de la précédente pour le confirmer et on ajoutait : « 1° La ville et le municipe de Rome n'ont jamais contribué pour aucune part à l'entretien du collège Romain; 2° Les papes lui ont accordé des subsides, mais subsides non puisés au trésor pu­blic; ces subventions étaient prises, au contraire, sur les fonds ecclésiastiques; 3° Les subventions venues de l'étranger, étaient données en vue de la destination internationale du Collège et elles ont complété la fondation et la dotation. Aujourd'hui les nations étrangères ne peuvent renoncer aux droits que leur confère le concours pécuniaire qu'elles ont formé et que con­firment les subsides accordés par les Papes, comme chefs de l'Eglise universelle, au collège romain. Les autres collèges, dont les recteurs souscrivent cette lettre, ne sont que des pensions ecclésiastiques, des communautés de formation cléri­cale, non des collèges supérieurs d'instruction, comme il en faut à tous les prêtres. Cette lettre n'eut pas plus d'effet que

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la précédente. Le Pape, abandonné des puissances, dut conti­nuer d'en appeler à la justice de Dieu et se couvrir de son droit : il défendit, aux personnes consciencieuses, l'acquisition des biens ecclésiastiques et renouvela les sentences portées par le droit contre tous les auteurs et fauteurs des brigandages subal­pins. Des sentences d'excommunication, c'est tout ce par quoi Victor-Emmanuel se montra successeur des Henri, des Barbe-rousse et des Frédéric d'Allemagne : ce n'est pas synonyme du prince chrétien.

© Robert Hivon 2014     twitter: @hivonphilo     skype: robert.hivon  Facebook et Google+: Robert Hivon