FOI CHRÉTIENNE
hier et aujourd'hui
p. 62
Ces considérations au sujet de la lutte chrétienne contre la déification du pouvoir pourraient également s'appliquer à la lutte menée pour l'amour humain authentique contre la fausse adoration du Sexe et de l'Éros, source d'asservissement de l'homme autant que l'abus du pouvoir.
Il y a plus qu'une simple image dans les paroles des prophètes flétrissant l'apostasie d'Israël, en la qualifiant “d'adultère ». Les cultes étrangers étaient presque toujours liés à la prostitution cultuelle et justifiaient la qualification d'adultère par leur forme extérieure même; par là ils trahissaient leur orientation profonde.
Pour comprendre que l'amour entre l'homme et la femme est unique, définitif et sans partage, il faut se référer à la foi en l'unité et en l'indivisibilité de l'amour de Dieu.
Nous comprenons aujourd'hui toujours mieux à quel point cette conception de l'amour, loin de pouvoir être déduite philosophiquement et
=================================
p63 QUESTIONS PRÉALABLES AU THEME DE DIEU
justifiée par elle‑même, suppose nécessairement la foi en un Dieu unique.
Et nous comprenons toujours mieux combien la soi‑disant libération de l'amour au profit des caprices (Beliebigkeit) de l'instinct livre l'homme à la tyrannie du Sexe et de l'éros, en le précipitant dans un esclavage impitoyable, alors qu'il prétend se libérer.
Dans la mesure où l'homme s'éloigne de Dieu, il devient la proie des “dieux». Pour être libéré, il faut qu'il accepte de se laisser libérer, en renonçant à se fier à lui‑même.
Il importe également, après avoir vu la signification du refus impliqué dans le Credo, de saisir le sens de l'assentiment, du “oui”, qu'il comporte. Le “non », en effet, n'a sa raison d'être qu'en fonction du “oui ».
Or, ce refus des premiers siècles chrétiens a eu pour conséquence historique la disparition irrévocable des dieux. Sans doute les puissances qu'ils représentaient n'ont pas disparu, pas plus que la tentation de l'absolutisation de ces puissances.
C'est là un effet de la condition humaine; les deux faits expriment pour ainsi dire la “vérité» permanente du polythéisme: l'absolutisation du pouvoir, du pain, de l'éros, menace les hommes d'aujourd'hui autant que ceux de l'antiquité.
Cependant, même si ces divinités de jadis sont restées aujourd'hui encore des “puissances » avec des prétentions totalitaires, elles ont quand même perdu leur masque divin, elles se voient contraintes de paraître dans leur vraie “profanité ».
C'est là la différence essentielle entre le paganisme pré‑chrétien et le paganisme post‑chrétien; celui‑ci porte la marque imprimée à l'histoire humaine par le refus chrétien des dieux païens.
Dans le vide où nous sommes aujourd'hui à beaucoup d'égards, surgit d'une façon d'autant plus impérative la question: quel est le contenu de l'assentiment que représente la foi chrétienne?
=================================
p64
2
LA FOI BIBLIQUE EN DIEU
Pour comprendre la foi biblique en Dieu, nous devons suivre son développement depuis les origines du temps des patriarches jusqu'aux derniers écrits du Nouveau Testament.
Nous commençons donc par l'Ancien Testament, qui nous fournit le fil d'Ariane pour nos recherches. Il a formulé son idée de Dieu dans deux noms Elohim et Yahvé.
Dans ces deux désignations principales de Dieu apparaît la discrimination et le choix opérés par Israel dans son monde religieux; en elles transparaît en même temps l'option positive résultant de ce choix et de la transformation progressive des éléments retenus.