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Chapitre quatre
La réserve eucharistique
-------- Le tabernacle eucharistique en tant que tente sacrée, lieu de la shekinah, de la présence du Seigneur vivant, n'est apparu qu'au deuxième millénaire, après de longs débats théologiques qui mirent finalement très clairement en évidence la présence permanente du Christ dans l'hostie consacrée. --------------
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-------- L'insistance avec laquelle le chapitre 6 de saint Jean souligne la présence réelle du Christ dans le pain consacré ne peut guère être surpassée----------
------ nous devons à Henri de Lubac une importante conclusion, --------le fait que l'eucharistie veut nous changer, veut faire de l'humanité elle‑même le Temple vivant de Dieu dans le Corps du Christ ‑ fut exprimée jusqu'au début du Moyen Age par le double concept de corpus mysticum et de corpus verum.
Dans le langage des Pères, mysticum n'a pas le sens de «mystique», tel qu'il est utilisé aujourd'hui, mais signifie: «appartenant au mysterium », au domaine du sacrement. Par corpus mysticum, on désignait donc le corps sacramentel, la présence du Christ dans l'eucharistie.
D'après les Pères, l'eucharistie nous a été donnée afin que nous devenions nous‑mêmes corpus verum (vrai corps) du Christ. L'évolution de la langue et de la pensée eut pour effet d'inverser le sens de ces expressions au Moyen Age.
On appela l'eucharistie corpus verum et l'Église corpus mysticum, où « corps mystique» n'avait plus le sens de «sacramentel » mais de «mystique», c'est‑à‑dire mystérieux. ---------
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L'Église primitive savait bien que le pain consacré demeure tel, puisqu'elle le conservait pour les malades et en faisait l'objet d'une grande vénération, comme c'est encore le cas aujourd'hui dans l'Église d'Orient.
Au Moyen Age, cette conscience de la présence réelle du Seigneur s'approfondit: le Seigneur a changé dans son corps la substance de ce morceau de matière, et ce changement est irréver-
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Dans ce pain transsubstantié, le Seigneur lui‑même, indivisible, le Ressuscité, est pleinement présent: chair et sang, corps et âme, dans sa divinité et son humanité ‑ le Christ tout entier est là. ---------
il s'agit d'une relation: le Seigneur vivant se donne à moi, entre en moi et m'invite à m'abandonner à Lui, en Lui, pour que soient réalisés ces mots de l'apôtre: je vis, ce n'est plus moi, mais le Christ qui vit en moi (Ga 2, 20). ------
«Il est là, entièrement Lui‑même, Il demeure là». ------- dans la substance transformée, le Seigneur est là et Il y demeure.
Lorsque cette conscience pénètre chaque fibre du coeur, de l'esprit et des sens, la conséquence est inévitable: il faut offrir à cette présence un lieu adéquat.
C'est ainsi que se précisa peu à peu la forme du tabernacle, qui occupera de façon très naturelle le lieu autrefois réservé à «l’Arche d'alliance», -------
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disparue de la synagogue.
En fait, le tabernacle réalise pleinement ce que l’Arche d'alliance avait représenté. C'est le «Saint des saints», la tente de Dieu, son trône, puisqu'il est parmi nous.
Sa présence, la shekinah, demeure maintenant réellement au milieu de nous, dans l'église de village la plus misérable, comme dans la cathédrale la plus prestigieuse. --------
-------- «Manger » le Christ, c'est en même temps l'adorer, le laisser entrer en moi, pour que mon moi se transforme, s'ouvre au grand “nous», et que nous devenions ainsi « un seul» (cf Ga 3, 17).
--------- la communion n'atteint sa véritable profondeur que lorsqu'elle est portée et entourée par l'adoration. --------- une église où la lumière perpétuelle brûle devant le tabernacle. --------- est bien davantage qu'un bâtiment de pierre: en elle le Seigneur toujours m'attend, m'appelle, veut me rendre moi‑même «eucharistique» et me met en mouvement vers son retour.