Darras tome 16 p. 127
27. Le lendemain, fête de l'exaltation de la Sainte Croix (14 septembre 636), Troïlus et Epiphane revinrent seuls trouver l'héroïque confesseur. Ils le dépouillèrent du petit nombre d'objets restés à son usage. Va, lui dirent-ils, tu n'as point voulu de l'honneur, l'honneur s'éloigne de toi. Tu n'auras que ce que tu mérites, en reprenant le chemin de l'exil. — Puis ils ajoutèrent : Tes deux complices, celui de Sélimbrie et celui de Perbère, n'échapperont pas au châtiment. Ils passeront bientôt devant notre tribunal. Sache-le bien, moine, si Dieu nous protège et nous délivre des barbares qui menacent en ce moment l'empire, le pape de Rome, cet insolent dont l'orgueil se relève, sera saisi avec tous ses disciples, amené ici et traité comme le fut Martin son prédécesseur ! Les barbares auxquels ils faisaient allusion étaient les musulmans dont les armées, nous l'avons dit, s'étaient avancées jusqu'en Sicile à l'ouest, et jusqu'aux portes de Constantinople à l'est. La victoire dont se flattaient les courtisans de Constant II ne devait pas répondre à leurs espérances. En attendant, Maxime fut livré à une escouade de soldats chargés de le conduire jusqu'à Sélimbrie, première étape de son exil. La garnison de cette ville était composée de chrétiens, auxquels on persuada que le saint abbé était un moine apostat qui blasphémait contre la sainte Vierge et lui refusait le titre de mère de Dieu. Nous avons déjà vu la même calomnie dirigée contre le saint pape Martin. Vraisemblablement les monothélites, afin d'exciter les passions populaires dans une
-------------------------------
1 S. Maxim. Acta., tom. cit., col. 162-107.
========================================
p128 PONTIFICAT DE SAINT EUGÈNE I (634-637).
controverse trop métaphysique pour être à la portée du peuple, avaient imaginé quelque raisonnement dans le genre de celui-ci : Distinguer en Jésus-Christ l'opération et la volonté divine de l'opération et de la volonté humaine, c'est implicitement déclarer que dans l'incarnation la Vierge fut la mère de l'homme et non la mère de Dieu. Si tel fut le paralogisme employé par les monothélites, la distinction des deux natures, qu'ils admettaient cependant, pouvait donner lieu à la même objection. La rumeur calomnieuse propagée à dessein dans le camp de Sélimbrie faillit aboutir à une émeute. Les soldats voulaient se précipiter sur Maxime et le mettre en pièces. Le préteur réussit à calmer les esprits. Une députation de centurions et de porte-étendards, accompagnés de prêtres et de diacres, se rendit près du vénérable captif. Un prêtre à cheveux blancs prit la parole et dit : «Père, votre nom est devenu parmi nous l'objet d'un grand scandale. On accuse votre sainteté de refuser à la Vierge notre Dame son titre de mère de Dieu. Au nom de la Trinité sainte, consubstantielle et vivifiante, je vous adjure de nous dire quels sont en réalité vos sentiments, afin que nous ne soyions pas injustement scandalisés à votre sujet. — En entendant cet étrange message, le confesseur s'était agenouillé et pleurait. Levant au ciel les mains et les yeux, il répondit : Quiconque ne reconnaît pas dans la Vierge notre Dame, digne de toutes louanges, très-sainte et immaculée, la mère du Dieu qui a fait le ciel et la terre, que celui-là soit anathème et catathème au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit, trinité consubslantielle et adorable, au nom du chœur des anges, au nom du sénat des apôtres et des prophètes, de la phalange innombrable des martyrs, maintenant et toujours et dans les siècles des siècles. Amen. — Les soldats et les prêtres, émus des paroles du vieillard et de la foi avec laquelle il les avait prononcées, le comblèrent de bénédictions. Père, disaient-ils, que Dieu vous protège et vous donne la force de supporter tous les tourments. —La multitude qui s'était jointe à la députation, en apprenant la profession de foi de Maxime, poussait des cris de joie. Tous voulaient entendre le confesseur et recueillir de ses lèvres les enseignements sacrés qu'il leur prodi-
=========================================
p129 CHAP. II. — SAINT MAXIME.
guait. Le rassemblement grossissait toujours; le préteur, plus alarmé de ces témoignages sympathiques qu'il ne l'avait été des démonstrations précédentes, fit enlever le confesseur pour le transporter à deux milles du camp, jusqu'à l'arrivée de la nouvelle escorte chargée de le conduire au terme de son exil. Mais les clercs ne voulurent pas se séparer du saint vieillard; ils le suivirent durant ces deux milles, et passèrent la nuit à ses côtés. Le lendemain, quand l'escorte fut arrivée, ils lui remirent une somme d'argent, produit d'une collecte faite au camp, le firent monter sur un cheval acheté par eux, et lui donnèrent le baiser de paix, se recommandant à ses prières et le saluant comme un martyr1. »
28. L'homme de Dieu fut conduit cette fois à Perbère, où il retrouva son disciple Anastase. Quelques mois après, tous deux furent ramenés à Constantinople. L'autre Anastase, l'ancien apocrisiaire, également rappelé de Sélimbrie, arriva en même temps qu'eux pour comparaître devant un synode monothélite, présidé par le patriarche byzantin. Nous n'avons plus les actes de ce conciliabule. La sentence qui y fut prononcée est seule parvenue jusqu'à nous. Après avoir anathématisé et livré à l'exécration de l'univers, dit l'hagiographe, les noms de Maxime, des deux Anastase, du bienheureux pape Martin et de saint Sophronius, patriarche de Jérusalem, les évêques formulèrent le jugement des accusés en ces termes : «Le présent synode, au nom de Jésus-Christ vrai Dieu et tout-puissant Seigneur, anathématisé et livre à la géhenne de Satan, vous Maxime et vous les deux Anastase, en punition de vos blasphèmes. Reste au pouvoir civil à frapper du glaive de la loi vos discours impies et vos attentats sacrilèges. Comme nulle pénalité humaine ne saurait être proportionnée à vos forfaits, nous remettons au juge suprême le soin de les punir selon la rigueur de sa justice éternelle. Pour ce siècle présent, nous vous laisserons la vie, adoucissant ainsi la sévérité des lois; Mais nous décrétons qu'au sortir de cette enceinte vous serez conduits au prétoire impérial, où son amplitude le clarissime préfet vous fera appliquer la
------------------
1 S. Maxim. Âota; Pair, grœc, tom. XC, col. 168-170.
=========================================
p130 TONTIFICAT DE SAINT EUGÈNE I (G34-657).
flagellation, ensuite on vous arrachera la langue, instrument de vos blasphèmes, et l'on vous coupera la main droite. En cet état vous serez promenés à travers les douze régions de cette auguste capitale, et conduits pour un exil perpétuel dans un cachot où vous pourrez, le reste de votre vie, pleurer sur vos crimes et souffrir les maux que vous vouliez appeler sur nos têtes.1 » Telle fut cette monstrueuse sentence. Les évêques qui la prononcèrent seront à jamais la honte de l'épiscopat byzantin. La fureur hérétique qui l'avait inspirée frappait bien plus l'hérésie elle-même que les martyrs. Après une pareille débauche de cruauté, le monothélisme était décrédité sans retour. Mais que dire du despotisme imbécile et brutal de Constant II lequel, non content d'avoir dicté à des évêques courtisans cet arrêt sanguinaire, prit plaisir à le faire exécuter avec tous les raffinements d'une atroce barbarie? « Maxime, dit l'hagiographe, fut traîné au prétoire, étendu sur le chevalet, flagellé à coups de nerfs de bœuf, jusqu'à ce que son corps, déjà si amaigri par la vieillesse et la souffrance, ne fût plus qu'un squelette sanglant. Les deux Anastase subirent le même supplice. A chaque minute, le préfet du prétoire stimulait le zèle des bourreaux en criant : « Point de pitié pour ces contumaces, rebelles aux ordres de l'empereur! » Après la flagellation, une main plus exercée, probablement celle d'un chirurgien, armée d'un instrument spécial, coupa la langue des trois confesseurs jusqu'à la racine en y comprenant l'épiglotte. « Ainsi tomba, disent les actes, cette langue du très-grand Maxime, la plus diserte, la plus éloquente, la plus féconde en enseignements divins, que depuis Chrysostome les Grecs eussent entendue.» Mais, par un prodige qui redoubla la rage des persécuteurs, l'homme de Dieu ne perdit point la parole après qu'on lui en eut arraché l'organe. Sans langue, il continua de parler, et l'on vit en ce jour comme une reproduction du miracle évangélique, quand Notre-Seigneur ouvrit la bouche du sourd-muet. Le même phénomène surnaturel eut lieu pour son disciple le moine Anastase et pour le prêtre et apocrisiaire du même nom,
----------------------------
1 S. Maxim. Acta; Pair, grasc, tom. XC, col. 171.
=========================================
p131 CHAP. II. — SAINT MAXIME.
avec cette particularité pour le premier, qu'ayant eu jusque-là une voix très-faible, sa parole prit dès lors un éclat et une ampleur inusités. On trancha ensuite la main droite à chacun des confesseurs. Ainsi mutilés et sanglants, ils furent promenés dans les rues de la ville, comme des parricides et des assassins. Malgré toutes les mesures prises pour exciter contre eux les passions populaires, ce spectacle n'excita guère d'autres sentiments que ceux d'une profonde horreur et d'une vive indignation contre le despotisme impérial. Constant II achevait par là de s'aliéner le cœur de ses sujets. Il fit traîner les trois martyrs dans le pays sauvage du Lazique, avec ordre de les abandonner sans secours et sans vivres sur la frontière romaine, près des cantonnements meurtriers des Alains. Il fallut transporter saint Maxime sur un brancard d'osier : mais à peine arrivé au terme de ce pénible voyage, près d'un castrum appelé Schemari, il rendit à Dieu son âme héroïque, à l'âge de quatre-vingt-deux ans (13 août 662). Anastase, son disciple, était mort en chemin le 24 juillet. L'apocrisiaire survécut quatre années, dont il employa tous les instants à la défense de la vérité. Il parvint à écrire, en attachante son poignet mutilé un système de petits bâtons qui soutenaient son stylet ou sa plume. Nous avons encore quelques fragments précieux des œuvres de saint Hippolyte, qu'il avait retrouvées chez les Alains, et dont il recueillit les témoignages favorables au dogme des deux volontés en Jésus-Christ1. Il mourut le 41 octobre 666 dans le castrum de Thusuma, au pied du mont Caucase. Le sang de ces martyrs criait vengeance. Constant II devait bientôt tomber sous les coups de la justice divine.
29. Le pape saint Eugène I ne devait pas en être témoin. Il mourut le 2 juin 657, après un pontificat de moins de trois années. Il avait, dans ce court intervalle, montré un courage et une fermeté dignes du successeur des apôtres. Nous n'avons malheureusement plus une seule des lettres qu'il eut occasion d'écrire soit à l'empe-
----------------------------------
1 S. Hippolyti Portuens., Testimonia cum prolog. ab Anastasio martyre collecta ; Patr. grœc, tom. XC, col. 178.
=========================================
p132 PONTIFICAT DE SAINT EUGÈNE I (654-657).
reur monothélite, soit aux diverses églises d'Orient et d'Occident, pour les prémunir contre l'hérésie byzantine. Cette perte est d'autant plus regrettable qu'elle nous prive d'un témoignage formel qui s'ajouterait, nous n'en doutons pas, à tous ceux que l'histoire a jusqu'ici fait passer sous nos yeux en faveur de l'orthodoxie d'Honorius. Ainsi, dans les divers interrogatoires subis par saint Maxime, alors que les hérétiques byzantins, si habiles à torturer, à falsifier même les textes des docteurs et des pères, réunissaient des séries de citations pour autoriser leurs erreurs, on a pu remarquer qu'ils n'invoquent pas une seule fois les fameuses lettres d'Honorius. Il fallait donc que, dès lors, la notoriété publique eût fait justice des calomnieuses interprétations dont ces lettres avaient été l'objet de la part des sophistes du patriarcat de Byzance. Mais si les monothélites se turent sur ce point, en revanche ils n'épargnèrent pas les menaces au pape saint Eugène, « dont l'insolence, disaient-ils, osait relever la tête. » Ils se promettaient de le voir arracher un jour à son siège, et subir le sort de son glorieux prédécesseur saint Martin. Leurs menaces et leur colère sont autant d'éloges pour la mémoire d'Eugène I, dont le nom, inscrit au martyrologe romain, demeure entouré de l'auréole des confesseurs pontifes.
=====================================
p133
CHAPITRE III.
SOMMAIRE. PONTIFICAT DE S. V1TALIEN (30 juillet 657 - 27 janvier 672).
§ I. l'empereur fratricide.
1. Notice de saint Vitalien d'après le Liber Pontificalis. — 2. Sagesse et modération des papes dans la lutte contre les empereurs monothélites. — 3. Hypocrisie et duplicité byzantines. — 4. Le calife Moaviah. Dynastie des Ommyades. — 5. Meurtre du prince Théodose par Constant II son frère. — 6. Constantinople abandonnée par l'empereur fratricide. — 7. Révolution en Lombardie. Le roi Grimoald. — 8. Défaites de Constant II en Italie. Sa retraite à Syracuse.— 9 Conversion des Lombards au catholicisme. —10. Schisme de l'archevêque de Ravenne Maurus. — 11. Fin tragique de Constant II. — 12. Avènement de Constantin IV Pogonat.
§ II. L'ESPAGNE CATHOLIQUE.
13. Situation florissante de l'Église en Occident. — 14. VIIe concile de Tolède. Le roi Chindaswind. — 15. Réceswind. VIIIe., IXe et Xe conciles de Tolède. — 16. Saint lldefonse évêque de Tolède. — 17. Saint Fructueux archevêque de Braga. — 18. Taio évêque de Saragosse. Sa vision à Saint-Pierre de Rome.
§ III. EGLISES DES GAULES.
19. Saint Sigebert I roi d'Austrasie. — 20. Règne et mort de Clovis II roi de Neustrie. — 21. Translation des reliques de saint Benoît et de sainte Scholastique au monastère de Fleury-sur-Loire. — 22. Privilèges et charges des abbayes royales. — 23. Martyre de saint Aigulfe (saint Ayoul). — 24. Régence de sainte Bathilde. — 25. Fondation de Corbie. Largesses de sainte Bathilde aux monastères. — 26. Fondation de Chelles. — 27. Mort de saint Ëloi. — 28. Sainte Bathilde aux obsèques de saint Éloi. — 29. Saints évêques. Fondation d’abbayes.
§ IV. ÉGLISES DE LA GRANDE-BRETAGNE.
30. Conférence de Streneshal au sujet de la célébration de la PAque. — 31. Lettre de saint Vitalien à Oswi roi de Northumberland. — 32. Saint Théodore sacré par le pape archevêque de Cantorbéry. — 33. Concile d'Hereford présidé par saint Théodore, — 34. Mort du pape saint Vitalien.
==========================================
p134 PONTIFICAT DE SAINT VITALIEN (637-G72).
§ I. L’empereur fratricide.
1. Vitalien, originaire de Signia 1 dans la province de Campanie, dit le Liber Pontificaiis, était fils d'Anastase. Il siégea quatorze ans et six mois. Selon la coutume, il envoya des apocrisiaires à Constantinople avec une lettre synodique pour notifier son ordination au très-pieux empereur. Les apocrisiaires reçurent un accueil favorable et obtinrent la confirmation des privilèges de l'église romaine. A leur retour, ils déposèrent sur le tombeau du bienheureux apôtre Pierre les riches offrandes faites par la munificence impériale, entre autres un évangéliaire recouvert d'or et de pierreries. Vitalien maintint dans toute leur vigueur les règles ecclésiastiques de la foi et de la discipline. Sous son pontificat, l'empereur Constant Auguste quittant la ville royale de Byzance, après avoir visité sur le littoral Athènes, Tarente, Bénévent, arriva à Naples dans l’indiction VIe (664). Le mercredi, cinquième jour du mois de juillet de la même indiction, il vint à Rome. L'« apostolique2» avec le clergé romain alla à sa rencontre jusqu'au sixième milliaire. L'empereur se rendit à pied à Saint-Pierre, il s'agenouilla à l'autel de la confession et y fit une offrande. Le samedi suivant, il fit de même à la basilique de Sainte-Marie (Majeure). Le dimanche il vint à Saint-Pierre, escorté de son armée. Les clercs allèrent le recevoir processionnellement, tenant tous à la main des cierges allumés. Il déposa comme offrande, sur le maître-autel, son manteau impérial tissu de soie et d'or, et assista à la célébration de la messe. Le samedi de cette seconde semaine, il se rendit au Latran, où un festin lui fut donné dans la basilique Julia. Le dimanche, la station eut encore lieu à Saint-Pierre, où la messe fut célébrée; l'empe-
----------------------------
1 Signia était une ancienne cité du pays des Herniques, à trente milles de Rome, sur la voie Lavieane.
2 C'est
la première fois que nous rencontrons le titre d' « apostolique » sine addito, employé pour désigner un pape. Cette expression
passa dans toutes les langues européennes et fut universellement adoptée au moyen
âge. Nos vieux chroniqueurs donnent au
souverain pontife le nom d’Apostole, exprimant ainsi d'un seul mot la vérité théologique, suivant
laquelle l'apôtre Pierre vit toujours dans la personne de ses successeurs.
=========================================
p135 CHAP. III. — L'EMPEREUR FRATRICIDE.
reur prit alors congé du pontife, n'ayant pas prolongé au delà de douze jours sa résidence à Rome. Ce temps lui suffit pour dépouiller la ville des objets d'art et autres ornements précieux, échappés au pillage des barbares. L'église de Sainte-Marie ad Martyres (Panthéon) perdit de la sorte les revêtements de bronze antique qui formaient sa toiture. Ce riche butin fut embarqué sur des navires et transporté à Syracuse, pour être, disait-on, expédié plus tard à Constantinople. L'empereur retourna à Naples, puis se rendit par la voie de terre à Reggio. Enfin il s'embarqua pour la Sicile, où il arriva dans l'indiction VIIe (603) et se fixa à Syracuse. Bientôt il fit peser sur les peuples de ce pays et sur les provinces de Calabre, de Sardaigne et d'Afrique une oppression telle qu'on n'en vit jamais de plus horrible. Les droits d'enregistrement (diagraphà), de cens, de navigation, portés à un taux exorbitant étaient exigés avec tant de rigueur qu'on incarcérait les débiteurs insolvables, enlevant les femmes à leurs époux, les fils à leurs pères, spoliant les saintes églises de Dieu, pillant les vases sacrés et les ornements des autels. Le désespoir était au comble. Peu après, le 13 juillet de l'indiction IXe (668), l'empereur fut assassiné pendant qu'il était au bain. «Mizitzès, proclamé par les légions «campées en Sicile, prit le sceptre et intronisa son usurpation. Des diverses contrées de l'Italie et de l'Afrique, de la Sardaigne, de l'Istrie et de la Campanie, des troupes marchèrent « contre le tyran, abordèrent à Syracuse, et avec l'aide de Dieu, «mirent à mort Mizitzès, dont la mémoire est restée maudite1. Sa « tête et celle des principaux complices de son attentat furent portées à Constantinople. Immédiatement après, les Sarrasins enva-hirent la Sicile, occupèrent Syracuse, et firent de toute la population un horrible massacre. Le butin dont ils chargèrent leurs
---------------------
1 Nec dicendus Mezzetius. Cette formule d'exécration, fort usitée à cette époque, est remarquable. La plupart des grands scélérats qui ont épouvanté le monde cherchaient surtout dans le crime l'immortalité de leur nom. Depuis Erostrate jusqu'à nos modernes incendiaires, il en fut ainsi. Peut-être l'histoire a-t-elle été trop indulgente, en conservant ces noms maudits dans ses annales.
==========================================
p136 PONTIFICAT DE SAINT VITALIEN (G57-672).
« vaisseaux fut immense. Ils emportèrent à Alexandrie toutes les « richesses enlevées par Constant aux églises et aux monuments de Rome1. » Le pape Vitalien survécut quelques années à ces événements. En quatre ordinations, il avait imposé les mains à vingt prêtres, un diacre et quatre-vingt-dix-sept évêques destinés à diverses églises. Il reçut la sépulture dans la basilique de saint Pierre le VI des calendes de février (27 janvier 672). Après lui le siège épiscopal resta vacant deux mois et treize jours 2. »