Darras tome 42 p. 613
33. A un si monstrueux attentat, il y a pourtant une excuse, les doctrines. Bismarck est un Prussien de son temps et de son pays ; il en a les idées, les sentiments el les passions. L'Autriche et ta France abattues, le Pape dépouillé de ses états, l'enthousiasme allemand a cru l'heure propice à l'accomplissement de ses rêves : Bismarck s'est chargé d'y pourvoir. Or ces idées touchent à la constitution de l'Etat et à la mission historique de la Prusse. Ketteler résume ainsi les idées politiques du Borusse : l'État sans Dieu; l'Etat-Dieu, et, par la suite, la guerre au vrai Dieu par l'Etat. La meilleure formule de cette doctrine impie a été donnée par Hegel : « L'Etat est le Dieu présent, le Dieu réel. L'Etat est la volonté divine rendue sensible, l'esprit divin qui se développe sous une forme réelle. Il est le divin et l'humain. Il est éternellement à lui-même son propre but. Il a tous les droits sur les particuliers. Le peuple or-
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ganisé en société est la puissance absolue sur la terre. » A coté de l'Etat-Dieu, il n'y a évidemment plus de place pour l'Eglise, pour le Christianisme. Si l'Etat est le Dieu présent, l'Église ne peut être qu'une institution de l'Etat. Pour expliquer ce passage d'Hégel, il faut se rappeler que le libéralisme avec son état-major, se met lui-même à la place du peuple véritable. Telle est la situation doctrinale de l'Allemagne ; le Dieu présent sur la terre, c'est l'Etat issu du libéralisme. Tous les chrétiens, tous les hommes doivent être contraints, au nom du progrès, de l'humanité et des lumières, d'adorer cette idole d'argile (1). Dieu est Dieu ; Bismarck est son prophète, Guillaume son Evangéliste et l'œuvre divine qui couronne le XIXe siècle c'est l'effacement de tous les peuples devant la mission de la Prusse. On ne dit pas si Attila, Tamerlan, Gengis-Khan ont été les précurseurs de sa gloire. Ce rêve grandiose eut un commencement d'exécution tout à fait ridicule. Avec l'appui des Juifs, des banquiers et des protestants libéraux ou nihilistes, Bismarck essaya de créer une religion et une église nationale. Doellinger s'était fortement prononcé contre l'infaillibilité, et, après sa définition, avait fait schisme. Doellinger et ses adhérents s'étaient flattés que des milliers d'ecclésiastiques étaient prêts à les suivre ; avec le concours de ces schismatiques en expectative, on espérait entraîner la masse du peuple. Le gouvernement s'arrêta donc à l'idée de fabriquer un évêque de sa façon ; le choix tomba sur Hubert Reinkens, docteur que ses antécédents ne paraissaient pas prédestiner à la mitre. Reinkens fut sacré par l'évêque janséniste d'Utrecht; quelques docteurs le suivirent ; la police lui livrâ les églises, mais le bon peuple refusa d'y entrer. Au début, il y eut bien quelques mascarades dont le servilisme et la curiosité faisaient les frais ; mais une tentative si audacieuse ne pouvait prévaloir contre le sens commun. Rien, en effet, de plus plaisant que ce Reinkens, élevé par la politique, doté par le trésor et devenu, sans autre forme, l'Apôtre de l'Allemagne. Qui lui avait donné cette mis-
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(1) Ketteler, Le Kulturkampf, p. 9.
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sion ? Qui lui avait conféré la juridiction, c'est-à-dire l'autorité spirituelle sur tous les habitants de ces innombrables contrées? Le Pape ? Non. L'évêque hérétique qui l'avait sacré ? Non encore, car il n'était rien en Allemagne. Donc c'était l'Empereur, comme souverain pontife de l'Empire. En d'autres termes, on revenait au paganisme romain, au temps à jamais déchu où César était Pontife et Dieu. On pouvait avoir cette audace, mais on ne devait pas avoir la force d'en accomplir les desseins.
La Gazette générale de l'Allemagne du Nord, feuille à peu près officielle de Bismarck, ne manqua pas de célébrer ce coup d'audace. « Le choix d'un si grand homme, —il s'agit de Reinkens — et sa consécration comme évêque missionnaire de toute l'Allemagne qui a été exécutée à la manière antique, conformément aux usages de l'Église dans la succession apostolique, doit, sans aucun doute, avoir dans les décrets de la sagesse éternelle une signification toute providentielle... De même que la personne de Reinkens est comme créée pour devenir un réformateur de l'Église catholique, de même le temps, dans lequel il a été choisi et sacré, a été préparé par la Providence afin de féconder son œuvre de réformation, et, par un heureux développement, introduire, en son temps, l'unité religieuse dans toute l'Allemagne. Au moment, peut-on dire, que les évêques de Prusse refusaient l'obéissance aux lois de l'État qui les obligeaient devant Dieu et leur conscience et le publiaient solennellement, Reinkens, ce grand homme plein d'enthousiasme pour tout ce qui est élevé, et par là même pour l'empereur, l'empire et la patrie, est choisi par un clergé patriotique et par les séculiers, évêque d'Allemagne, et publié solennellement dans une lettre pastorale, écrite aussitôt après sa consécration, qu'il veut être évêque allemand, avec un cœur allemand et une langue allemande. » — « C'est bien cela, dit Mgr Janiszewski ; au lieu de l'unité catholique, l'unité allemande ; au lieu d'évêques catholiques, des évêques allemands; au lieu d'un cœur étendu comme celui des Apôtres à toutes les nations de la terre, un cœur rétréci à la mesure de l'Allemagne ; au lieu de la langue qui est
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entendue pur les fidèles de tout l'univers, la langue allemande; telle est la mission historique de la Prusse, telle est la grande conception de l'intelligence allemande. Voilà bien la civilisation au nom de laquelle on combat l'obscurantisme catholique ; voilà l'idée à laquelle préside par la diplomatie, par les armes, par le fer et le feu, la personne même du grand chancelier, le prince de Bismarck, cause motrice de la persécution prussienne el du débordement, contre l'Eglise catholique, de toutes les passions de la libre pensée (1). »
34. Avant de devenir le grand pontife de Dieu-État, Bismarck avait affiché d'autres principes. L'unité allemande, la guerre au Danemarck, le mariage civil, l'émancipation des Juifs l'avaient eu pour adversaire, et avec ce don qu'il a de dire le mot propre, il s'était défendu de prendre passage sur ce vaisseau de fous qui cingle contre l'Église. Que dis-je? il s'était fait gloire d'appartenir à l'opinion qu'on accuse d'obscurantisme et de retour au moyen âge. Du moment qu'il est devenu l'agent général des loges maçonniques, Bismarck se retourne comme un gant et se flatte d'engager le combat pour la civilisation en montant sur le Xaarenschiff. En homme habile, il se garde toutefois de démasquer toutes ses batteries. D'abord, il suprime, au ministère des cultes, le département des affaires catholiques. Après la dispute des mariages mixtes, on avait institué le département dans une pensée de bienveillante justice; en le supprimant, sans motif sérieux, il était entendu que les catholiques n'auraient plus personne pour connaître de leurs griefs. Ensuite le gouvernement se prit à soutenir, contre l'évêque de Warmie, un prêtre apostat, aumônier d'un collège catholique; le ministère prussien menaça d'expulsion tous ceux qui refuseraient de suivre les cours de cet excommunié. Cet éclat de mauvaise volonté fut bientôt suivi, d'un acte législatif présenté au Reichstag, pour toute l'Allemagne, contre les soi-disant abus de la chaire : c'est la loi-Lutz. Etait exposé à un emprisonnement, de deux ans au plus, tout prêtre coupable d'avoir, à l'église ou hors de
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(1) Histoire de la persécution en Prusse, p. XXV.
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l'église, dans un sermon ou discours quelconque, mis en danger la tranquillité publique, en discutant les affaires de l'État : c'était une loi des suspects ; elle fut votée en trois jours, moins qu'il n'en faut pour coudre une camisole de force. En 1872 suivit une loi qui ôtait au clergé la surveillance des écoles élémentaires; les nouveaux inspecteurs devaient démolir l'histoire sainte, expulser les crucifix et adresser, dans les examens, des questions comme celle-ci : quels sentiments doivent remplir le cœur d'une jeune fille à la vue d'un jeune officier de hussards? Les vieux catholiques, les protestants, les francs-maçons, sur un mot d'ordre, se mirent à déclamer contre les Jésuites; les catholiques et les évêques les défendirent. Toutes ces motions et pétitions furent envoyées au grand hypocrite, chancelier de l'Empire, avec prière de présenter une loi contre la tyrannie ecclésiastique, et, en particulier, de régler la situation légale des religieux. Une loi fut donc rendue qui expulsait purement et simplement de l'empire prussien les Jésuites et tous les ordres religieux qui leur sont affiliés. Tous les ordres religieux se ressemblent quant au principe; tous se diversifient par leur objet; par là même qu'ils co-existent, ils répugnent à l'affiliation. Mais il fallait à Bismarck une loi absurde pour avoir congé de violence. La loi fut rendue encore plus dure par la manière dont le gouvernement la fit exécuter. Sous couleur d'affiliation, Bismarck chassa tous ceux qu'il voulait proscrire, et il le fit à la prussienne, c'est-à-dire avec une rigueur encore plus absurde que la loi. A l'ordre des Jésuites se trouvèrent affiliés même les Dominicains et les Franciscains fondés trois siècles plus tôt, et aussi des ordres religieux de femmes qui ne connaissaient, des Jésuites, guère que l'existence. Ce n'était là, pour Bismarck, qu'un prélude.
Avant de pousser plus à fond, Bismarck, si rusé d'ailleurs, fit publier par le docteur Friedberg, un écrit intitulé : L'Empire d'Allemagne et l'Eglise catholique. Dans cet écrit, le docteur mercenaire combattait la séparation de l'Église et de l'État, pour trois raisons : 1° parce que cette séparation, en Amérique, loin
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d'être nuisible à l'Église, lui avait été, au contraire, très favorable; 2° parce que si les protestants étaient abandonnés à eux-mêmes, ils ne tarderaient pas à tomber en dissolution; 3" parce que les vieux catholiques, encore trop jeunes pour se suflire, s'ils étaient délaissés de l'État, ne pourraient même prendre racine. Au lieu de séparation, Friedberg propose le retranchement de l'Eglise, sa séparation du corps social par section, opération chirurgicale qu'il faut préparer en liant l'artère, de manière que l'ablation d'un membre ne débilite pas le corps de l'État. La saignée ne sera pas grande, la blessuie se cicatrisera vite. En d'autres termes, c'est le programme de Dioclétien : Nomine catholicorum deletoo : programme qui pourrait réussir, si le catholicisme était une institution humaine ; heureusement l'Eglise repose sur la pierre et les portes de l'enfer ne prévaudront ni contre la pierre, ni contre l'Église. Malgré le discrédit de l'aventure, malgré l'échec de si cruels persécuteurs, Bismarck recrute des soldats pour sa campagne ; il enrôle tous les matérialistes prussiens, Wirchow, Gneizt, Sybel, Hinschius, Treischke et pousse en avant le ministre des cultes, docteur Falk. C'est sous son nom que Bismarck édicte, pendant les années 1873, 1874, 1875, ses fameuses lois de Mai, toutes destinées à détruire la liberté de l'Eglise et à procurer l'anéantissement du catholicisme en Allemagne.
35. Dès le commencement de l'année 1873, furent proposées, à la diète de Berlin, les quatre lois suivantes : 1° De l'éducation du clergé et de la nomination aux postes ecclésiastiques; 2" De l'autorité disciplinaire ecclésiastique et de la formation d'un tribunal royal pour les affaires de l'Église; 3° De la limite des droits concernant les peines ecclésiastiques et les moyens disciplinaires; 4° De la sortie de l'Église. La première de ces lois statue que nul ne pourra remplir les fonctions ecclésiastiques en Prusse s'il n'est allemand, s'il n'a reçu son éducation suivant les termes de la présente loi, et s'il a encouru quelque blâme du gouvernement; en sorte que, pour rendre un prêtre impossible, il suffit de le blâmer. L'éducation des clercs passe tout entière
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aux mains de l'État : ils doivent subir l'examen dans un gymnase, passer trois ans dans une université et n'être ordonnés qu'après un examen d'État. Tous ces établissements, universités, gymnases, sont soumis à la surveillance tracassière de l'État. Les évêques ne peuvent plus ni former leurs prêtres, ni les pourvoir qu'avec le concours de l'autorité civile; et ils ne peuvent sans crime laisser les postes vacants. — La seconde loi sur les peines disciplinaires transfère au roi le pouvoir suprême du pape et institue un tribunal royal pour juger sans appel les affaires de l'Église : c'est la propre formule du schisme et la constitution civile du clergé prussien. Dès lors, les peines disciplinaires n'ont d'autre limite que l'arbitraire de l'État; et la loi de sortie attribue à tous les schismatiques les biens ci-devant possédés par les catholiques : c'est la prime à l'apostasie. Il était impossible d'avouer plus cruement qu'on mettait de côté toute conscience et tout droit, pour monter à l'assaut de l'Eglise. On y mit même une certaine franchise cynique et grotesque. Comme on rayait de l'ordre des réalités vivantes la liberté de conscience, il était par trop absurde de laisser subsister dans la Constitution prussienne, les articles qui la garantissaient. On remania donc les articles 15 et 18 de la dite constitution établissant que le droit de nomination aux postes ecclésiastiques par l'État était supprimé, ou plutôt on ajouta qu'il était maintenu. D'une part, l'Eglise était libre de nommer; d'autre part, l'État était libre de l'en empêcher. Un pair protestant prononça le mot de la situation; par ces lois, on rayait, des institutions prussiennes, tout principe de liberté; on retournait jusqu'aux temps du plus complet absolutisme. L'État est Dieu et le ministre des cultes est son prophète.
On pense bien qu'on ne pouvait édicter des lois si iniques et si violentes sans provoquer des protestations. Les évêques allemands, réunis à Fulda, élevèrent la voix avec autant de décision juridique que de courage. «Nous souvenant, disent-ils, de la parole apostolique qui déclare que les évêques sont institués par
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l'Esprit-Saint pour gouverner l'Église du Dieu, que Jésus-Christ a acquise par son sang; nous souvenant en conséquence, qu'il est de notre devoir le plus sacré d'accomplir fidèlement ce commandement de l'Espril-Saint, nous ne consentirons à rien en ce qui touche l'administration el le gouvernement des églises qui nous sont confiées, à rien qui soit contraire aux préceptes de la foi catholique et aux droits épiscopaux. » L'effet de cette protestation dépassa tout ce qu'on pouvait attendre : non seulement des milliers d'adresses et de députalions leur vinrent de tous les points de l'Allemagne; mais les évêques de l'Autriche, de l'Angleterre, de l'Italie, de l'Amérique et de la France envoyèrent leurs encouragements et leurs félicitations. Le Prussien, quelque peu désappointé, imagina une contre-adresse, écrite par le roi Guillaume, qui fut endossée par le duc de Ratibor, catholique d'Etat, traître à l'Église. Lorsqu'on vit d'où venait celte adresse et par quelle pression on voulait la faire signer, elle tomba en discrédit; l'Empereur se félicitant lui-même, c'était, en effet, trop fort; mais persécutant les autres pour faire contresigner son auto-panégyrique, c'était reculer les limites du ridicule. Bismarck exaspéré tira de son sac un de ces tours dont il est coutumier; contrairement à tous les usages diplomatiques, il publia une lettre de Pie IX à Guillaume et la fit suivre au Moniteur prussien, d'une réponse royale qui ne brillait pas précisément par la politesse. De plus, on procéda aux élections générales; mais, trait significatif, les conservateurs descendirent de 125 à 11 el la fraction du centre monta de 52 à 89. Les catholiques persécutés gagnaient du terrain; les protestants persécuteurs en perdaient et tout ce qu'ils perdaient devait passer en partie au socialisme. En d'autres termes, la persécution, qui devait anéantir l'Église, ne menaçait que la Prusse et tous les coups portés par Bismarck retombaient sur son œuvre. « Encore une victoire comme celle-ci, disait la Gazette de la Croix, el nous périrons. »
A la rentrée des Chambres, Bismarck, avec cette obstination ardente qui est le propre de sa nature altière, fit proposer par
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Falk, pour 1875, deux projets de loi: l'un relatif à l'administration des diocèses vacants, car il était évident que tous les évêques allaient être dépossédés et que le seul Reinkens resterait pour représenter l'épiscopat de Prusse; l'autre, pour compléter la loi précédente sur la formation cléricale et dresser les séminaristes suivant la formule de l'État prussien. Comme il était à craindre que ces lois insensées ne fussent pas en état de dompter les résistances catholiques, Bismarck jugea nécessaire de les compléter par une loi de bannissement. Le but de cette dernière loi était de briser l'opposition aux lois de Mai, en prévenant par des mesures sévères, l'accomplissement des fonctions ecclésiastiques. D'après les décrets de Bismarck, conférer les saints ordres, dire la messe, prêcher, confesser, administrer les autres sacrements était un crime punissable; il n'était plus permis d'être ni évêque, ni prêtre, ni catholique, ou du moins on ne pouvait en remplir les devoirs qu'en apostasiant. Les catholiques de Prusse devaient donc, à chaque pas, à chaque mouvement qu'ils se permettraient, se trouver coupables devant la loi et, par conséquent, tomber sous ses coups. L'infernal génie de Bismarck procédait, d'ailleurs, dans l'application de cette loi, avec une parfaite logique d'écrasement. Pour les premiers délits, l'amende et par suite la vente de tous les biens meubles et immeubles du coupable au profit du fisc; on commençait par vous dépouiller de tout et vous mettre nu comme ver : c'est la tradition la mieux établie des Hohenzollern. Ensuite le prêtre ou l'évèque, destitué par le tribunal du roi de Prusse, et déjà puni, s'il remplissait quelque nouvelle fonction, était interné dans une forteresse. Après avoir été interné, il pouvait être externé, c'est-à-dire expulsé de certaines provinces. A la fin, il pouvait être banni du pays prussien et privé de tous ses droits civiques. Quoique condamnés, destitués, internés, externés, bannis, les évêques étaient toujours évêques, et Bismarck qui, avec toute sa puissance, n'aurait pas pu faire une goutte d'eau bénite, ne pouvait ni dégrader, ni consacrer un évêque. Dans son fol orgueil de tyran, il imagina cependant une loi pour
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nommer, de son chef, aux évêchés vacants par ses destitutions. Cette loi sommait les chapitres d'élire un successeur à bref délai, et, faute de ce, Bismarck déléguait un administrateur de la mense et de la curie épiscopale; dans le fait, ce ministre de Prusse, chancelier de l'Empire, devait se trouver, par ses délégués, évêque administrateur de tous les diocèses. Le roi de Prusse était devenu Pape et Bismarck, bien que laïque, était devenu son Cranmer.