Un seul Seigneur 14

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III

 

MEDITATIONS THEOLOGIQUES

SUR LA SEMAINE SAINTE 1

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1. Radiodiffusées en 1967 et 1968

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Vendredi Saint

 

PREMIÈRE MEDITATION

 

------« Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé. » Au fond, tout l'évangile de Jean n'est que l'accomplissement de cette prophé-­

 

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tie, l'effort pour concentrer nos regards et notre coeur sur Lui. Toute la liturgie de l'Église n'est rien d'autre que le regard tourné vers le Transpercé, ------- « Voici le bois de la croix où fut pendu le Sauveur du monde » « Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé. » --------

 

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« Aucun de ses os ne sera brisé », ----------Jésus, transpercé par la lance à l'heure même de l'immolation rituelle au Temple des agneaux de la Pâque, est lui‑même le véritable Agneau pascal sans tache ;     en Lui seulement devient visible la signification réelle du culte. ---L'homme sent intérieurement que seul le don de lui‑même serait apte à honorer Dieu d'une façon digne de Lui ; --------- l'appel de Dieu ------ demande notre propre personne, une adoration

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vraie dans le geste d'un amour sans réserve. Tandis que les agneaux de la Pâque sont immolés dans le Temple, aux portes de la ville un homme meurt, le Fils de Dieu, tué par ceux‑là mêmes qui croient l'honorer dans le Temple. Dieu meurt en tant qu'homme. Il se donne totalement aux hommes, impuissants, eux, à se donner à lui ; à la place du culte inefficace de substitution, il met la réalité de son amour surabondant. --------- Jésus passe à travers le voile de la mort. Il se présente devant son Père, non pas avec le sang d'êtres de remplacement, mais en s'offrant lui‑même conformément aux exigences d'un amour véritable qui ne peut donner moins que soi‑même. La réalité de l'amour

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qui se donne lui‑même a pris la place du jeu de substitution, désormais terminé à jamais. Le voile du Temple s'est déchiré; il n'y a plus d'autre culte que la participation à l'amour de Jésus‑Christ, jour cosmique perpétuel de la réconciliation. L'idée de substitution, de représentation a reçu en Jésus-Christ un sens inouï, entièrement nouveau. En Jésus‑Christ, c'est Dieu lui‑même qui a pris notre place, et c'est de ce mystère de représentation que nous vivons tous.

 

--------- Jean nous dit qu'un soldat a ouvert le côté de Jésus avec une lance. Pour cela, il se sert du terme employé déjà dans l'Ancien Testament pour décrire la création d'Ève tirée du côté d'Adam endormi. Quelle que soit la signification précise de cette allusion, une chose est Claire: Jean veut dire que le mystère de la création de l'homme et de la femme, ne formant qu'une « seule chair », se répète dans la relation du Christ avec l'humanité croyante. L'Église naît du côté ouvert de Jésus

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mourant ; en d'autres termes, moins imagés: c'est la mort du Seigneur, son amour radical allant jusqu'au don de lui‑même, qui est le fondement de la fécondité de l'Église. ----------- Le côté ouvert devient ainsi le symbole d'une nouvelle image de l'homme, d'un nouvel Adam ; ce côté ouvert caractérise le Christ comme l'homme « pour » les autres. ------------

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-------- Jésus est l'homme véritable, l'homme idéal vers lequel tout être humain doit tendre pour trouver sa réalité propre. Il l'est parce qu'il n'est pas « hypostase », subsistant en soi et pour soi. Car ce qui est supérieur au «pouvoir subsister en soi et pour soi », c'est ne pas pouvoir ni vouloir subsister en soi, mais se quitter pour aller vers les autres, à partir de Dieu‑Père. Jésus n'est en quelque sorte que le mouvement de sortie de soi pour aller vers le Père et vers les hommes. Parce que chez lui, le cercle qui l'enfermait en lui‑même a été radicalement rompu, il est à la fois Fils de Dieu et Fils de l'homme. Étant entièrement pour les autres, il est pleinement lui‑même, le modèle de la vraie humanité. Devenir chrétien signifie devenir homme, en réalisant l'être humain véritable qui est «être-pour‑les‑autres » et « être‑de‑Dieu ». La plaie béante du Crucifié, la plaie mortelle du Nouvel Adam, c'est le point de départ du véritable être humain de l'homme « Ils regarderont celui qu'ils ont transpercé. »

 

© Robert Hivon 2014     twitter: @hivonphilo     skype: robert.hivon  Facebook et Google+: Robert Hivon