Darras tome 42 p. 319
24. Mais la grande erreur que dût combattre plus persévéramment Pie IX, c'est le libéralisme. Depuis cent ans, le libéralisme, c'est la grande illusion qui domine le monde, c'est l'erreur-mère du XIXe siècle, c'est le masque de tous les impies et la puissante séduction des fidèles. Dans ce monde, livré en proie à toutes les erreurs, l'œil complaisant du libéralisme ne voit pas d'erreur.
Ne blâmer rien
Trouver tout bien
C'est le système
Que j'aime.
Dans ce système de complaisance, la vérité et l'erreur doivent se traiter avec une égale faveur : il y a du vrai et du faux dans tous les systèmes. La vertu et le vice sont également respectables ; dans la vertu il y a toujours quelques lacunes, dans le vice il y a toujours quelque vertu. La réconciliation universelle que le christianisme prêchait par l'amour de Dieu, le libéralisme entend l'obtenir par l'amour de soi. Mais ces maximes de tolérantisme supposent des principes sociaux et religieux qui ne cadrent pas avec l'orthodoxie. Par exemple, elles supposent que la société n'a aucun devoir envers la religion et qu'elle doit rester confinée dans le naturalisme. Par
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p320 PONTIFICAT DE PIE IX (1810-1878)
exemple, elles supposent encore que Jésus-Christ, rédempteur des âmes, n'est point le roi des nations, et que l'Eglise est sans qualité, pour exiger de l'Etat, l'exercice de sa puissance. La religion est une affaire privée, elle n'a rien à démêler avec l'ordre public. Il n'y a, ici-bas, qu'une société extérieure et souveraine, l'Etat. L'Eglise, comme société pleine et parfaite, doit disparaître et descendre au niveau d'une petite association, reconnue ou non, par l'Etat, mais persévéramment dépouillée de toutes ses prérogatives de droit divin. Le libéralisme couvre donc, de sa protection dissimulée, toutes les erreurs dont nous venons de dresser la nomenclature; il n'est pas seulement le déversoir de toutes les impuretés de l'esprit humain ; il est encore la doctrine qui leur donne crédit et l'arme qui fait leur force. Dans l'organisation sociale du libéralisme, Jésus-Christ descend de son trône ; le monde est livré à Satan, prince de ce siècle. La Franc-maçonnerie est la religion du monde dégénéré et la révolution, port promis à tous les vices, en doit être le châtiment. Le Pape anti-libéral porte, dans les plis de sa robe, la fortune de l'Eglise et toutes les espérances de la civilisation.