La foi chrétienne hier et aujourd’hui 21

FOI CHRÉTIENNE

hier et aujourd'hui

p. 48

 

b) La foi comme « symbole”

 

   Notre réflexion sur l'histoire du symbole des Apôtres nous a montré dans la profession baptismale la structure primitive de la doctrine chrétienne et du même coup la forme originelle de ce que nous appelons aujourd'hui «dogme».

 

Il n'y a pas, à l'origine, une série d'énoncés que l'on pourrait cataloguer et enregistrer comme dogmes. Une telle conception s'impose peut‑être à notre esprit aujourd'hui, mais ce serait une méconnaissance de la vraie nature de la profession de foi en Dieu qui s'est manifesté en Jésus‑Christ.

 

Tout le contenu de la foi chrétienne est inséparablement lié à la profession du baptême qui signifie : assentiment, renonciation, conversion, retournement de l'être, nouvelle orientation de vie. Autrement dit, la doctrine chrétienne n'existe pas sous la forme d'énoncés, séparés comme des atomes, mais dans l'unité du Symbole, nom donné par l'Église primitive à cette profession de foi baptismale.

 

C'est le moment de cerner de plus près ce mot. Symbole vient du grec symballein mettre ensemble, réunir. Une coutume antique en constitue l'arrière‑plan: deux parties adaptables d'un anneau, d'un bâton ou d'une tablette, comptaient comme signe de reconnaissance pour des hôtes, des messagers ou des partenaires d'un traité.

 

Le fait d'être en possession du morceau correspondant donnait droit à un certain objet ou simplement à l'hospitalité. Le symbole est un élément qui renvoie à un autre élément destiné à

=================================

 

p49 LE VISAGE ECCLÉSIAL DE LA FOI

 

le compléter, pour créer ainsi une connaissance et une unité réci­proques. Il est expression et moyen d'unité 21.

 

   Ainsi, la désignation de la confession de foi comme symbole, indique profondément sa vraie nature. Car tel est le sens des formulations dogmatiques de la primitive Église: permettre une confession commune de Dieu, une adoration commune.

 

Comme tel, le symbole renvoie à l'autre, à l'unité de l'esprit dans l'unité de la parole. De ce point de vue, selon la juste remarque de K. Rahner, le dogme (ou le symbole) implique toujours une détermination de la terminologie 22 qui, sous l'angle de la pensée, aurait pu être différente, mais qui, en tant que formulation, a son sens bien précis: créer la communion dans l'expression de la foi.

 

Le dogme n'est pas un énoncé isolé qui aurait sa raison d'être pour soi et en soi, il est l'expression de notre culte, la forme de notre conversion, par laquelle nous nous tournons non seulement vers Dieu, mais encore les uns vers les autres pour sa commune glorification.

 

C'est dans ce contexte qu'il faut situer la doctrine chrétienne. Il serait intéressant d'établir, en partant de là, une histoire des formes (------) de la doctrine de l'Église depuis le dialogue baptismal, en passant par le “Nous » conciliaire jusqu'à “l'anathème », à la Confession réformée et finalement au dogme, en tant qu'énoncé particulier.

 

On mettrait ainsi en lumière la problématique et les divers degrés de prise de conscience, impliqués dans les expressions que la foi s'est forgées.

 

   De tout cela il ressort que chaque homme ne détient la foi que comme “symbole », comme une pièce incomplète et brisée, qui ne saurait trouver son unité et son intégralité qu'en s'unissant aux autres.

 

Pour réaliser le symballein, l'union, avec Dieu, il faut nécessairement passer par le symballein :l'union, avec les autres hommes. La foi demande l'unité, elle appelle les frères dans la foi, elle est essentiellement orientée vers l'Église.

 

L'Église n'est pas une

=================================

 

p50 « JE CROIS ‑ AMEN »

 

institution secondaire, formée à partir d'idées sans rapport avec elle, tout au plus un mal nécessaire. L'Église est partie intégrante de la foi, dont le sens est la confession commune et l'adoration commune.

 

  Cette découverte nous ouvre encore un horizon nouveau: l'Église, dans sa totalité, ne détient, elle aussi, la foi que comme symbolon, comme une moitié brisée, qui n'est vérité que par sa relation à l'infini, à ce qui est tout autre, et à quoi elle vise au‑delà d'elle‑même. La foi ne peut s'approcher de Dieu qu'à travers cette brisure infinie du symbole, à travers ce dépassement perpétuel de l'homme.

 

© Robert Hivon 2014     twitter: @hivonphilo     skype: robert.hivon  Facebook et Google+: Robert Hivon